Je délaisse un instant Richard Strauss pour me pencher sur Berlioz et ses Nuits d’été ; décision dont l’origine est un petit bijou trouvé sur YouTube.
Les Nuits d’été sont six mélodies composées par Berlioz sur des poèmes de Théophile Gauthier. Les six textes choisis par le compositeur font partie d’un recueil que Gauthier publia en 1838 sous le titre La Comédie de la Mort On peut trouver que ces poèmes ne sont pas des chefs-d’œuvre mais la musique composée par Berlioz est, elle, éblouissante. La version originale pour mezzo-soprano ou ténor est achevée en 184, avec accompagnement au piano. La version pour orchestre sera achevée en 1856.
Berlioz, dans ses Nuits d’été, a réalisé musicalement l’idée d’un cycle mélodique selon le principe de l’art du Lied allemand depuis Beethoven : développement des thèmes de l’amour naissant et de l’invitation à l’amour, ou du regret sous différentes formes typiquement romantiques.
Villanelle : nature bucolique et primesautière ; le poème en lui-même est très fade mais il est racheté par la musique, son coloris orchestral et son entrain capricieux.
Le spectre de la rose : Type même de la mélodie romantique, ample, somptueuse comme un grand air d’opéra. Elle rappelle l’air de Marguerite dans la Damnation « d’amour, l’ardente flamme ».
Sur les lagunes : c’est un lamento. Le thème du voyage est là pour dissiper le chagrin d’un amour défunt.
Absence : C’est la première des six mélodies à avoir été orchestrée. Ce lamento est différent du précédent, il relève davantage de la déclamation que de la mélodie. La répétition du terme « reviens, reviens ! » donne un aspect lancinant qui dénote peu d’espoir.
Au cimetière : c’est l’évocation de l’amour détruit par la mort.
L’île inconnue : Ce poème contient l’idée du voyage, de l’aventure et le désir d’un bonheur paradisiaque.
Les Nuits d’été ne sont pas l’œuvre la plus connue de Berlioz. Et pourtant, comme dirait Michelin, elles méritent vraiment le voyage…
J’ai parlé au début de ce billet d’un « bijou ». En fait, j’aurais dû utiliser le pluriel : deux bijoux, deux interprétations extraordinaires de ces Nuits d’été par deux grands monstres de l’art lyrique : Régine Crespin et Janet Baker.
La première chante Le spectre de la rose. Je l'ai choisie parce qu'on ne pouvait pas passer à côté d'une telle perfection. Mais que les admirateurs de Janet Baker se rassurent : son interprétation est aussi magnifique. Chez l'une comme chez l'autre, on ne peut qu'admirer la perfection du timbre, de la diction, de l'articulation, (et chapeau pour Baker dont le français n'est pas la langue maternelle), de la nuance (peut-être plus chez Crespin que chez Baker), de la présence scénique bien que ce soit des extraits de récital.
Voila donc par Régine Crespin Le spectre de la rose. A vous de juger.
Et par Janet Baker : Villanelle
Puis : Absence