Voir de Mieux en Mieux - Martin BROFMAN
« Chacun de nous vit dans une bulle qui filtre nos perceptions. Toutes nos impressions passent au travers de cette bulle, qui filtre et sélectionne les seules informations que nous estimons adaptées au moment présent.
En un sens, cette bulle est nécessaire car nous sommes sollicités par tant d’informations – les vêtements des gens, leur visage, les caractéristiques de notre environnement, le nombre des feuilles sur les arbres, la température de l’air, les dimensions de chaque nuage dans le ciel, tous les sons qui nous entourent, etc. Sans processus de sélection, nous nous sentirions en plein chaos, comme si nous regardions une télévision où toutes les chaines apparaîtraient en même temps sur l’écran. On peut aussi comparer cela à la mémoire d’un ordinateur. Toutes les informations stockées ne sont pas nécessaires ou utiles en même temps mais, dès qu’elles sont dans la machine, nous pouvons y accéder quand nous en avons besoin.
De la même façon, toutes les informations que nous enregistrons n’ont pas besoin de l’être consciemment. Elles traversent notre bulle sans se faire remarquer mais sont accessibles quand nous en avons besoin, que ce soit par un effort de mémoire volontaire ou par le biais de techniques comme l’hypnose ou la régression sous hypnose. Si l’on imagine, par exemple, que chaque bulle est d’une couleur particulière, on peut dire que telle personne voit le monde au travers d’une bulle rouge, bleue, ou autre.
Bien sûr, au travers d’une bulle rouge, le monde paraît rouge et, au travers d’une bulle bleue, il paraît bleu. En réalité, le monde n’est peut-être ni rouge ni bleu mais blanc ou noir. Imaginez quelqu’un qui vit dans une bulle bleue en train de discuter de la couleur du monde avec quelqu’un qui vit dans une bulle rouge… chacun sera certain d’avoir raison et, en fait, chacun aura raison, de son point de vue, compte tenu de ce qu’il voit depuis sa bulle. Chacun exposera avec exactitude sa propre perspective. On pourra dire qu’ils ont raison tous les deux. On pourra dire également qu’ils n’ont raison ni l’un ni l’autre par rapport à la réalité absolue qu’ils voient au travers de leurs filtres. En revanche, on peut dire que chacun rend compte honnêtement de son expérience et que cela nous donne un aperçu de la bulle dans laquelle il se trouve.
On pourrait dire que chaque bulle est un produit de l’esprit de la personne et que l’intérieur de la bulle est un miroir, si bien que les gens ne voient pas forcément le monde tel qu’il est mais qu’ils le voient plutôt tel que, eux, ils sont. Les gens qui sont sous l’emprise de leurs perceptions projettent sur leur vision du monde leurs propres désirs et valeurs. Quand les gens jugent les autres, ils disent en réalité que, s’ils étaient cette personne, ils seraient en train de mal agir. Ils seraient en train de juger l’autre en fonction de leurs critères personnels et, peut-être aussi, en train de se juger en fonction des critères des autres. Ils auraient peut être un point de vue complètement différent s’ils connaissaient les intentions de l’autre, ses valeurs et ses motivations.
Quand les autres vous jugent en fonction de leurs critères, par exemple en décidant que vous vous trompez, ils ne font que projeter leurs intentions sur vous. Quand vous réussissez à communiquer vos intentions, souvent le jugement des autres disparaît. En effet, vous leur avez donné le point de vue que vous avez depuis l’intérieur de votre bulle. Dans tout échange il peut donc être utile d’avoir les deux points de vue, le regard porté de l’intérieur vers l’extérieur et le regard porté de l’extérieur vers l’intérieur. Les hypermétropes ont plus souvent le point de vue de celui qui regarde de l’extérieur vers l’intérieur que l’inverse. Les deux regards sont importants et envisager ces deux points de vue donne une information plus complète pour prendre des décisions intelligentes.
Peut-être connaissez-vous des gens dont vous dites : « si seulement ils suivaient leurs propres conseils » ! Cela montre qu’ils voient les reflets d’eux mêmes qu’ils projettent sur leur entourage. Peut-être même avez-vous remarqué qu’il vous arrive de donner d’excellents conseils à différentes personnes. Mais, cet excellent conseil serait-il utile pour vous-même ? On peut dire que nous attirons les gens qui nous donneront les informations dont nous avons besoin. En un sens, le monde est plein de gens qui se parlent à eux-mêmes mais quelques-uns seulement s’écoutent. Quand vous avez réalisé cela, vous continuez de vous parler mais, en plus, vous vous écoutez. Vous vous demandez si cette information qui provient de vous-mêmes vous est utile ; ensuite, éventuellement, vous suivez votre conseil.
Vous pouvez aussi voir les gens qui vous conseillent comme des gens qui sont en train de se parler à eux-mêmes et de se donner d’excellents conseils ! Simplement, s’ils s’écoutaient, ils sauraient quoi faire ! Un bon moyen de savoir si le conseil que vous donnez est destiné à vous-même ou à l’autre est de vous demander si vous attachez plus d’importance à le dire que l’autre personne à l’écouter. Dans le premier cas, les mots veulent sortir pour que vous les entendiez. Cela marche aussi bien dans l’autre sens, c’est-à-dire quand vous vous apercevez que quelqu’un tient plus à vous donner son avis que vous à l’entendre. Cela veut dire que cet avis est destiné à la personne qui le donne.
Quand les deux personnes sont intéressées par ce qu’elles sont en train de se dire, la communication passe. Autrement, remarquez simplement vos impressions et demandes-vous comment vous réagiriez si c’était vous qui donniez votre avis. Remerciez intérieurement cette personne pour l’aide qu’elle vous apporte dans votre cheminement vers la clarté. Peut-être remarquerez-vous alors que vous percevez cette personne autrement : vos impressions du passé ont rempli leur rôle et ont disparu et vous pouvez maintenant voir l’autre dans le présent. Si vous êtes conscient de votre bulle, vous pouvez vous connaître vous et ce que vous vivez. Vous pouvez donc discerner les moments où vous vous projetez sur les autres et décider de revoir votre position. Vous pouvez alors passer « de l’autre côté du miroir » et voir la réalité des autres. Aux niveaux d’appréhension du monde les plus courants, l’effet de miroir n’est pas conscient et l’on est soumis à sa façon de percevoir.
Il y a un niveau d’appréhension, de perception où ces processus deviennent conscients et régissent l’expérience vécue. C’est le niveau du cœur vu au travers de la bulle d’amour inconditionnel, d’acceptation. Quand vous voyez directement les autres comme vous-mêmes, règnent la compassion, la compréhension et la sagesse : vous parlez aux gens comme s’ils étaient vous-même, comme vous aimeriez que l’on vous parle. Quand vous jugez les autres, vous pouvez en prendre conscience et utiliser cette lucidité pour élever votre approche du monde jusqu’au niveau de l’acceptation. Il en résulte la disparition des tensions de votre esprit. [...]