Bon, on reste calme, déjà t’es conscient, c’est cool, tu respire à peu près normalement, recool. Alors on va chercher les collègues, s’allonger, faire un ECG et appeler l’interne la chef.
“Bon ben Thomas, ça ressemble à un Bouveret, on va essayer les manoeuvres vagales et si ça ne passe pas on te passe de la Striadyne.” Moi je veux bien appuyer sur mes yeux, mais je ne veux pas de Striadyne. Rebooter mon ordi, ok, mais moi on ne me redémarre pas comme ça quand j’ai planté, Madame. Parce que la Striadyne je veux bien en passer aux autres, mais la sensation de claquer, tout le monde autour avec un petit sourire crispé, l’atropine et le défibrillateur à portée de main ça ne me dit rien. J’en rajoute sûrement un peu, mais à 190 de fréquence au repos on s’inquiète facilement.
Les yeux ça marche pas, les carotides non plus. Les doigts dans la bouche ça marche. Je choisis toujours la méthode la plus chic en société.
Par précaution, je me retrouve en USIC pour la nuit. Et là, je m’en suis voulu de plein de trucs. Et je m’excuse.
- Je suis désolé d’avoir déjà braillé “Eh Kévina, tu peux me ramener un tube bleu steup’?” à 3 heure du matin à ma collègue qui est de l’autre côté de la réa.
- Je suis désolé d’avoir déja gloussé comme un crétin devant une chambre pendant une heure.
- Je suis désolé d’être parfois arrivé en courant à 2 heures du matin avec une escouade de 4 autre soignants pour secouer un patient qui dort paisiblement en lui demandant si tout va bien “nan parce que ça sonnait asystolie, hein”
- Je suis désolé d’être plusieurs fois entré sans frapper. Maintenant je sais qu’on peut tuer pour ça. Surtout quand on est en train d’essayer pisser assis dans un putain de pistolet.
- Je suis désolé d’avoir empêché quelqu’un d’aller au toilettes, vraiment désolé désolé.
- Je suis désolé d’avoir déjà dit “il” alors qu’”il” est à 50 cm de moi.
Mais là du coup j’ai payé, j’ai compris la leçon, je peux sortir maintenant? Ah pas avant le staff? Ah bon. Ah ils sont partis manger? Ah bon.