De calmes ruelles bordées d’arbres, des petites maisons colorées à un ou deux étages : les gaothan, “villages” en maharati la langue de Bombay, font partie des nombreuses surprises que réserve la ville. Il en existe encore environ deux cents dispersés sur tout la péninsule. Mais pour combien de temps ?
Le gaothan de M. D’Lima, près de la gare d’Andheri, au nord de la péninsule, est déjà largement défiguré. Pour cet irréductible, réputé pour sa ténacité, le combat a commencé en 2006 lorsqu’il a entamé une action en justice. L’idée est de faire inscrire ces petites havres de paix sur la liste du patrimoine de la ville et ainsi les protéger contre les constructions, illégales ou pas, de hauts immeubles. “Mes enfants sont nés ici, dans ce bungalow construit par mes ancêtres, cela n’a pas de prix je me battrai jusqu’au bout”.
Menacé à plusieurs reprises et attaqué à coups de couteau, ce fervent catholique reconnaît que «c’est la lutte de David contre Goliath, les tours poussent comme des champignons». Et suite à une modification de la loi régissant l’urbanisation, la plupart d’entre elles risquent d’être bientôt légalisées… Le FSI, l’indice qui détermine la hauteur légale des constructions sur un espace donné est augmenté un peu partout.
La densité de population est déjà de 27 000 personnes par kilomètre carré à Bombay. L’espace se fait rare et une des solutions les plus souvent avancées pour résoudre la crise du logement est de construire des immeubles, toujours plus hauts.
Actuellement l’immeuble le plus haut de la ville, et d’Inde, compte 45 étages, pour une hauteur de 161 mètres. Mais des tours jumelles, comptant 60 étages, soit 282 mètres chacune, s’élèvent lentement. Tandis que le chantier du gratte-ciel le plus haut d’Asie Pacifique (90 étages) doit démarrer dès l’an prochain. 25 buildings en construction auront plus de 40 niveaux. Les petites maisons à un ou deux étages qui prédominaient il y a à peine dix ans, font place à des immeubles qui en comptent 14 actuellement pour 30 mètres de haut en moyenne.
“Regarder cet immeuble , il y a de cela deux ans, c’était un magnifique bungalow construit au XVIIIème siècle, me raconte M. D’Lima, en me sortant une photo. Quand le propriétaire est mort, son fils qui vit en Nouvelle Zélande ne voulait pas s’encombrer, il a vendu à des promoteurs et voilà ce qui est sorti de terre en seulement quelques mois”. Car dans ces oasis urbaines, situées en plein cœur de la péninsule, le mètre carré vaut de l’or. Et seuls quelques-uns résistent encore à la pression des promoteurs.
En 2007, Bombay, qui a connu la plus importante augmentation des loyers (+ 21%), se classe au sixième rang des villes les plus chères au monde pour le logement.
C’est que la ville la plus dynamique du sous-continent attire chaque jour des milliers d’Indiens en quête d’un travail rémunérateur et d’une vie meilleure. La classe moyenne, de plus en plus importante, s’enrichit, ce qui accroît également la demande de logements. D’après la Banque asiatique de développement, 10 millions de logements supplémentaires devraient être construits en Inde chaque année d’ici à 2030 pour y répondre. En attendant, l’espace se raréfie et la situation devient critique..