Magazine Politique
Un mauvais sondage est publié ce jour pour la leader socialiste. Une sorte de désamour semble s'installer entre elle et l'opinion. Pourquoi ?
Ségolène Royal est d'abord en crise de rupture.
L'opinion publique recherche un "autre demain". Il faut donc incarner cette rupture pour un nouveau départ.
Cette rupture fut le socle de la percée de Ségolène Royal en 2006.
Pour bien comprendre la situation actuelle, il faut en effet revenir à la naissance du "phénomène Ségolène Royal".
Depuis 1974, chaque année précédant l'élection présidentielle avait vu naître son " troisième homme ". Ils eurent pour noms Michel Jobert en 1974, Coluche et Yves Montand en 1981, Bernard Tapie en 1988, le dernier en date fut JP Chevènement lors des présidentielles de 2002.
Face aux échecs cinglants systématiques de ces " troisièmes hommes ", la mode est passée du " troisième homme " à la " première femme ".
Pourquoi ?
Parce que d'une part, Ségolène Royal a exprimé le décalage entre les repères traditionnels des politiques de 1er plan et les préoccupations de la société.
Les premiers ne parlent pas comme la seconde. Tout est en décalage. Le 1er terme ci-dessous est celui utilisé par les responsables politiques. Le second est celui attendu par la société. Le décalage est édifiant :
* collectivité / individu,
* travail / loisirs,
* religion / matérialisme,
* efforts / jouissance,
* certitude, doute,
* optimisme / angoisse,
* croyance / peurs,
…
Cet décalage crée un espace. Ségolène Royal l'a occupé durant le premier semestre 2006 qui fut son espace temps le plus imaginatif et novateur.
Le second facteur de sa percée résidait dans le "mainstream" du moment : les valeurs féminines.
Dans un monde d'angoisses et de précarités, la recherche d'harmonie appelle des concepts, des mots, des attitudes plus proches des valeurs féminines traditionnelles.
Le véritable tournant fut janvier 2007 pendant lequel Ségolène Royal est revenue comme les autres, parmi les autres, ceux là qu'elle avait vaincus lors de la primaire.
Ce fut le début de la stagnation puis de la chute.
Elle avait perdu sa "valeur ajoutée".
Elle n'a jamais retrouvé cette valeur ajoutée parce qu'elle n'a jamais retrouvé sa fraîcheur du premier semestre 2006, période pendant laquelle elle incarnait une "autre politique".
Ségolène Royal est en crise de rupture.
Elle n'assure plus de rupture avec rien. Elle n'a donc plus de pouvoir d'évocation fort.
C'est en reconstruisant ses ruptures qu'elle retrouvera l'opinion.