- Salut patron
!
- Hein ? Mais... où êtes-vous ?
- Là, à la fenêtre.
- Ah !
- Coucou !
- Je suppose que vous allez encore trouver une bonne explication pour vous être retrouvé dans cette espèce de civière suspendue.
- Tout à fait, mais d'abord permettez-moi de vous faire remarquer que je ne suis pas en retard pour une fois.
- Ah oui tiens.
- Quand même !
- Oui non mais j'imagine que vous n'allez pas rester de toutes façons.
- Ah parce que... il faut rester après ?
- Oui, c'est un peu le principe quand on a un travail.
- Non mais parce que d'habitude j'arrive et je dois repartir juste après vous avoir parlé !
- Oui, en effet, mais ça c'est parce que d'habitude vous arrivez après l'heure de la débauche, quand les gens normaux rentrent chez eux, retrouver leur femme, leurs enfants, leur chien, leur
hamster ou je ne sais quoi d'autre.
- Vous voulez dire qu'il y en a qui passent toute leur journée ici ?
- Et bien en fait, à part vous, tout le monde fait ça.
- Ah d'accord. Mais ils font quoi en attendant ?
- En attendant quoi ?
- Et bien, de rentrer chez eux !
- Quoi ? Vous n'avez même pas la moindre idée de ce pourquoi vous devez venir ici ?
- Et bien si, il faut être à l'heure.
- Mais à l'heure pour quoi faire ?
- Ah tiens c'est vrai ça, je ne m'étais jamais posé la question. C'est déjà pas facile d'être là à l'heure.
- Oui je pense bien... Bon alors, et que vous est-il arrivé aujourd'hui ? Et hier, on ne vous a pas vu il me semble ?
- Ah oui, alors bon, comme souvent, je me suis levé raisonnablement, hier, pour n'avoir qu'une heure de retard, vous aviez l'air d'y tenir tellement.
- Disons que c'était un bon compromis en effet.
- Voilà. Et le timing était parfait, je vous assure.
- C'est sans doute pour ça que vous êtes arrivé pas moins de vingt trois heures après l'heure prévue...
- Non mais après il y a des éléments indépendants de ma volonté qui sont entrés en ligne de compte.
- Comme par exemple ? Vous avez encore détruit la voiture ?
- Mais non voyons, je ne ferais jamais une chose pareil. Je n'y suis strictement pour rien.
- Ce qui ne change pas grand chose au résultat finalement...
- Si, quand même. Cette fois-ci vous n'êtes pas prêt de la récupérer.
- Que s'est-il passé ?
- J'y viens, ne soyez pas si impatient. Déjà, dès que j'ai ouvert ma porte d'entrée, je suis tombé sur un rocher énorme et fumant qui me bloquait le passage.
- Un rocher ?
- Oui, énorme, et fumant.
- C'est quoi cette blague ?
- C'est justement ce que je me suis dit. Quel est le farceur qui est venu planter son rocher ici, c'est un coup monté. A un moment j'ai même pensé que c'était vous.
- Comme si je n'avais que ça à faire...
- Non mais je sais bien, c'est juste que je n'arrivais pas à comprendre. Alors j'ai essayé de sortir par la fenêtre, mais c'était pareil.
- Comment ça ?
- Ben pareil, un rocher, partout y'en avait, même à l'étage. Mais là c'était peut-être ceux du bas qui faisaient double-usage, je sais pas.
- Et vous n'avez rien vu venir, bien entendu...
- En fait, il était assez tôt, puisque je voulais vous faire plaisir, et il faisait très sombre. Du coup je les avais pas vus avant.
- Mais qui les a amenés ici ?
- Apparemment ce seraient des météorites venues du ciel.
- Oui, ça, elle vont pas venir du sous-sol.
- Et il y en avait plein. C'est peut-être ça qu'on appelle une pluie de météorites.
- Sans doute. Et vous n'avez rien entendu ?
- Je dors avec des boules Quies !
- Et il en serait pas tombé une sur votre maison, évidemment...
- Non, tout autour, et d'ailleurs pour la voiture...
- Non ça va c'est bon j'ai compris. Alors qu'avez-vous fait ?
- J'aurais bien téléphoné mais aucune ligne ne fonctionnait !
- Et donc ?
- Et ben j'ai réuni mes affaires de l'époque où je faisais de l'escalade, et j'ai entrepris de passer par dessus.
- Ah, ça explique les gants.
- Exactement. J'ai escaladé comme un pro, vous m'auriez vu, vous seriez fier !
- Oui sans doute.
- Je me suis même dit : "Tiens c'est dommage ça, si le patron il m'avait demandé de faire de l'escalade plutôt qu'être à l'heure, il serait vachement content.".
- Dommage. Et après ?
- En fait c'était super haut, et j'ai mis pas loin de trois heures pour arrivers en haut. En faisant quelques pauses pour me reposer en cours de route, hey, j'ai plus la forme comme dans le
temps.
- Et une fois en haut, vous avez eu un autre problème...
- Comme si vous y étiez ! Vous êtes très fort hein ? Vous êtes sûr de n'y être pour rien ?
- Parfaitement.
- En fait d'en haut, j'arrivais pas à voir le sol en bas. Du coup j'ai commencé une descente en rappel.
- Et la corde était trop courte.
- Mais... comment vous savez ?
- Une intuition.
- Et bien en effet, je n'avais pas assez de corde.
- Alors vous avez appelé à l'aide, puisque votre portable marchait de ce côté là du mur.
- C'est dingue, vous savez déjà tout ! Ah, sauf que j'ai passé la nuit suspendu à la corde aussi.
- Et enfin, on est venu vous chercher en hélicoptère.
- Mais oui ! C'est ça !
- Et vous m'enverrez la facture.
- Bien entendu, vous voulez toujours avoir des preuves et tout ça, je ne voudrais pas que vous ayez un doute.
- Ca va de soi...
- Bon, alors à demain ?
- Oui, c'est cela même, à demain...
- Salut patron !