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Les feuilles qu'on foule, un train qui roule, la vie s'écoule (G. Apollinaire)
Publié le 04 septembre 2008 par Rafaele
22 juillet. Gare du Nord. 18h58. Le compartiment de la 1ère classe dans lequel je m'engouffre est presque vide. Le Nord n'est pas la destination de vacance idéale des Parisiens. Je m'assois et pose romans et revues achetés à la librairie sur la un siège vacant. Je ne sais pas pourquoi je m'évertue à acheter de la lecture : je sais pertinemment que je ne lirai par pendant le voyage et que je finirai le regard perdu dans le vide, la tête dans les pensées. Bientôt deux voyageurs se joignent à moi. Lui, plus consciencieux, lira plus tard le roman qu'il a pris soin de ranger dans sa valise. Pour le moment, il sort son casque stéréo, le pose sur la tête et ferme les yeux. Elle se débarrasse de la plante verte qui l'encombre et installe son ordinateur portable sur la tablette centrale. Tout en chaussant ses lunettes, elle jette un rapide coup d'oeil en direction de ses voisins. Je l'observe et trouve que cela lui donne un air d'intellectuelle très à la mode. Nous attendons le départ quand entre, presque à la dernière minute, une jeune maman tenant fermement dans ses bras un nouveau-né. Chacun d'entre nous la regarde enlever avec précaution les sangles du corset qui retient l'enfant sur le ventre maternel. Prenant sa place à nos côtés et sans se soucier de ses voisins, elle adresse quelques risettes à l'enfant qui, à son tour, lui sourit. Mais bientôt le visage de celui-ci se tord et la bonne humeur cède la place aux cris et aux larmes : il faut nourrir l'enfant ! Alors, délicatement, la jeune femme relève son chandail rose et laisse apparaître, sous le regard à la fois incrédule et émerveillé de ses voisins, le sein qui, presque instantanément, délivre bébé des tourments de la faim.