J’ai commencé cette lecture avec un peu de gêne face à la polémique en cours. C’est un livre prêté. Je me suis même demandé si j’allais le lire, et encore plus en parler ici. Et finalement je l’ai lu, pour en discuter avec ma prêteuse. Kamel Daoud est en effet accusé d’avoir puisé son récit dans l’histoire personnelle de Saâda Arbane. Selon elle, les confidences partagées avec sa psychiatre, épouse de Kamel Daoud, auraient servi de socle au roman. Si tel est le cas, c’est effectivement terriblement révoltant. J’ai donc continué ma lecture avec cette accusation en tête, tout en découvrant cet épisode dont j’ignorais tout de l’histoire algérienne, un moment de grandes violences qui s’y est déroulé entre 1992 et 2002, appelé guerre civile ou décennie noire... Aube est une jeune femme, presque muette, au sourire dessiné par une cicatrice, aux cordes vocales détruites, marquée par une longue balafre au cou sur laquelle est installée une canule. Tout le monde veut oublier la guerre civile des années 90. Aube raconte donc à sa fille dans son ventre son histoire. Elle a pour projet de ne pas continuer cette grossesse, les médicaments pour son dans son tiroir. Mais avant, elle aimerait se rendre dans le village où elle est née une deuxième fois, où elle a été sauvagement blessée. Sa mère adoptive est loin, et elle profite d’une journée où son salon de coiffure est fermé pour prendre la route, une route terriblement dangereuse encore… Je dois dire que ce livre a occupé ma semaine car il est dense, admirative de la très belle écriture de Kamel Daoud, qui se défend face à la polémique de retranscrire là des faits connus de tous, troublée par les violences extrêmes lues mais décrites avec poésie. J’ai beaucoup aimé la longue rencontre que fait Aube avec Aïssa, ce libraire qui sillonne le pays pour vendre des livres de cuisine et qui s’est donné comme mission d’être la mémoire vivante des exactions de ces années sanglantes. Ce livre est d’une grande force et relate des faits importants dont je n’oublierai certainement plus l’existence dorénavant.
Editions Gallimard – 15 août 2024
J’ai aimé ce livre, un peu, beaucoup…
Prix Landerneau et Prix Goncourt 2024
éé