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Vive l'Ossétie libre !

Publié le 03 septembre 2008 par Edgar @edgarpoe
Face au déferlement de propagande anti-russe, c'est la seule position défendable : la France doit reconnaître l'indépendance de l'Ossétie du sud, sous conditions.
Les conditions doivent permettre de définir les modalités régionales d'exercice du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Ce droit a été mis en avant par le président Wilson à la fin de la première guerre mondiale. C'est un droit qui s'oppose à une position plus prudente, qui est le principe d'intangibilité des frontières.
Les Etats-Unis et leur valet, l'Union européenne, ont décidé de faire revivre le droit des peuples en reconnaissant le Kosovo. Oh, on trouve maintenant pléthore d'éditorialistes pour bien vouloir concéder que la reconnaissance du Kosovo devrait entraîner,en toute logique, celle de l''Ossétie. Mais ce serait ignorer que l'Occident c'est le bien et les bronzés/jaunes/russes/musulmans c'est le mal. Les gentils éditorialistes admettent qu'il y a eu une jurisprudence Kosovo, mais maintiennent qu'il faut s'asseoir dessus pour l'Ossétie.
Et de dénoncer, sur des pages entières, les dignitaires Ossètes qui seraient des généraux russes à la retraite (et les dirigeants des pays de l'est formés à Columbia/Yale/Harvard, sur des bourses US ?) Les massacres commis par les Ossètes étaient détaillés lundi sur plusieurs pages par Libé, alors qu'un bref encadré de dix lignes évoquait des massacres commis par les Géorgiens.
Plus généralement, l'Union européenne sert aux Etats-Unis à contenir la Russie. Nous sommes les idiots utiles de la stratégie américaine de containment rénovée.  Et l'Union européenne, soutenue par ses membres les plus à l'est, d'approuver plus ou moins bruyamment toutes les initiatives les plus imbéciles de la clique conservatrice américaine. Jusqu'aux missiles nouvellement installés en Pologne et autres pays européens, et dont une revue allemande estime qu'ils sont une arme contre la Russie. Que dirait-on si Poutine essayait, en 2008, de réinstaller des missiles à Cuba ? On hurlerait au scandale, au militarisme forcené ! Et là, rien. L'Union européenne en acceptant ces missiles sur son sol signe elle-même son arrêt d'inutilité, et de servilité. Chaque soi-disant citoyen européen doit bien se dire, s'il est un peu lucide, que la politique extérieure de sa "mère-patrie" est servile et stupide, et conçue comme cela.
Par ailleurs ce n'est pas fini, et le pire est sans doute à venir. Jean "voice of america" Quatremer reprend quasiment à son compte les propos délirants d'un universitaire néerlandais très néocon, dans un billet
récent :
Pour renouveler le projet européen, Van Ham estime que l’Union doit se montrer « méchante »
et « collectionner les scalps » afin de se faire « respecter » : « en subissant le rite initiatique de l’intervention, elle se débarrasserait de son image civile féminine pour accéder au rang des superpuissances dirigées par les émules de Superman », ironise le professeur néerlandais. La guerre jouerait donc le rôle cristallisateur d’identité qu’elle a joué dans la construction des États : ce phénomène « reste sous-jacent à la nature de la société postmoderne européenne. Au plus profond de l’homme postmoderne européen subsiste le désir nietzschéen de glorifier la guerre comme le plus grand de tous les stimulants physiques et mentaux. Qui plus est, seules la guerre et l’anarchie en tans qu’autre ultime peuvent faire réellement apprécier le soi paisible et domestiqué de l’Europe : le déclin est sinon inévitable. La guerre est l’ombre jungienne qui confère sa profondeur à la Persona de l’Europe tout autant que le fondement possible d’un sens communautaire ».
Voilà à quoi nous mène cette merde qu'est l'Union européenne : il nous faudrait une bonne guerre.
Je ne suggère pas que nous devons nous rouler par terre devant les russes. Je dis que la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni - ceux qui ont les moyens militaires dont, heureusement, l'Union Européenne ne dispose pas - doivent poser des conditions pour la reconnaissance de l'Ossétie, avec des critères clairs sur les conditions d'éventuels changements de frontières aux bordures des zones d'influence russe et européenne.
En attendant, je me réjouis chaque fois que je peux lire quelques pages qui échapent au climat de propagande militaire ambiant. Par exemple, dans Marianne la semaine dernière, sous la plume de Jean-François Kahn, dix idées sur la Russie :
1. Quand Gorbatchev a réclamé des moyens pour une transition douce, le gentil occident l'a envoyé promener ;
2. Eltsine a éliminé Gorbatchev en 1991 avec le soutien du gentil Occident, pour appliquer une thérapie de choc tellement infâme que les russes en sont venus à regretter Staline ;
3. La Russie a été pillée par quelques oligarques à cette occasion, qui n'ont pas été vus par le gentil occident comme des Bernard Tapie puissance 10 mais comme des héros de la liberté (ah ah !) ;
4. Eltsine a envoyé des chars contre son Parlement qui refusait de lui octroyer des pouvoirs exceptionnels. Le gentil Occident a applaudi... Eltsine...
5. le FMI, bras financier du gentil occident a appliqué lui-aussi une petite cure d'austérité supplémentaire, pour que ceux qui auraient voulu se contenter d'un retour à Brejnev en viennent eux-aussi à préférer Staline, voire le Tsar de toutes les russies...
6. la Russie a été humiliée partout du point de vue des relations internationales, elle ne comptait plus ;
7. au Kosovo dès 1999, et en Irak notamment, l'avis de la Russie n'a pas été pris en compte ;
8. Face à Poutine, qui a voulu restaurer un semblant d'ordre (avec l'approbation de sa population, qui n'est pas composée que de soiffards, contrairement aux opinions de BHL), le gentil Occident n'a accepté aucun compromis et a même accru sa pression sur la Russie, soutenant des révolutions "orange" tournées contre la Russie ;
9. Saakachvili a renversé un démocrate et s'est comporté en tyran pas plus éclairé qu'un Poutine, malgré, là encore, la propagande type BHL.
10. Là dessus, la reconnaissance du Kosovo par les USA et leur valet européen a agi comme un feu vert donné à la Russie en Ossétie, Abkhazie et ailleurs : l'Europe est fondée sur la loi des ethnies, et les ethnies ont partout raison.
Voilà. C'est sans trop de nuances, mais ce qu'on lit sur la Russie est assez peu nuancé en général, donc je ne me sens pas gêné outre-mesure.
Il est temps que les yeux s'ouvrent sur le prix délirant que nous payons pour notre adhésion à l'Union.
J'entendais ce matin la malheureuse Martine Aubry sur Inter, qui dénonçait la concurrence généralisée instaurée par la droite en France, et en appellait à l'Europe humaniste. Comme si le traité de Lisbonne ne contenait pas une quarantaine de références au principe de concurrence, justement. Elle est soit très malheureuse (lucide mais ne voulant pas faire de peine à son papa), soit très cynique, soit très stupide la pauvre Martine.
La gauche se condamne à perdre tant qu'elle restera aveugle sur l'Europe, laquelle Europe est incompatible avec les valeurs universalistes qui sont celles du projet républicain.

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