1968
E per tetto un cielo di stelle
Giulio Petroni
Avec : Giuliano Gemma, Mario Adorf
Le titre français est superbe, plein de promesses de désenchantement lugubre et de violence frappée au coin de la destinée. Un titre pareil pour un western, bien-sûr, une fois qu’on l’a lu, on trouve ça évident. Mais bravo tout de même au gars qui a trouvé ça il y a quarante ans, il fallait y penser le premier ! L’intro aussi est pleine de promesse de mortalité désespérée dans un monde de lenteur extrême. Giuliano Gemma enterre en plein désert des innocents qui sont morts à sa place. La musique d’Ennio Morricone opère de son charme inimitable mais souvent imité tandis que Mario Adorf observe la scène de loin, sans rien dire. Giuliano Gemma sait que Mario Adorf l’observe et Mario Adorf sait que Giuliano Gemma le sait. Enfin, Mario Adorf se décide, prend une pelle sur sa mule, et va aider Giuliano Gemma à enterrer ses cadavres. Il pourrait lui dire un mot, il pourrait lui dire « bon sang, quel massacre, que Dieu ait pitié de leurs âmes », mais non il se tait, car il habite au pays du western spaghetti, où la violence va de soi, ou les hommes communiquent par le regard, la pose et la nonchalance, où chacun sait ce qu’il a à faire sans se préoccuper d’un stupide vernis de civilisation. Quand on enterre des innocents dans le désert, on raconte pas sa vie.
Mais voilà, après cette bonne première séquence, le film part dans une toute autre direction. Le western spaghetti tragique et crépusculaire fait place à la comédie simple, non parodique et sans complexe. En soit ça n’est pas un problème, et dans la mesure où la violence reprend ses droits de façon fugace et régulière, cela aurait pu donner un film d’exception, où le rire est désamorcé quand on s’y attend le moins par le retour à la tragique réalité, rendant par là même cette violence encore plus choquante. Malheureusement ce n’est pas le cas car l’aspect comédie est raté, les gags sont lourdement appuyés et prévisibles, les dialogues sont longs, plats et répétitifs, le doublage est à peine correct et on s’ennuie poliment en attendant de sourire un peu. Le personnage de Mario Adorf est tellement stupide qu’il est impossible de l’apprécier. Giuliano Gemma lui, joue son rôle « sympa » avec son aisance habituelle mais ça ne suffit pas. La relation entre les deux ne fonctionne pas, et il n’y a pas seulement un semblant d’indice qui explique pourquoi Gemma s’attache à un type aussi idiot. Les quelques bonnes idées de scénario (le faux télégraphe, l’attraction de la sirène (décidément cette fascination du western italien pour le cirque…)) ne parviennent pas à rattraper les multiples scènes navrantes (la séduction de la veuve, l’arnaque de la banque, le ranch délabré, le truc sur les lapins, le cracheur de feu) ! Le tout n’est au demeurant pas si mauvais et reste tout à fait regardable, mais après une aussi prometteuse introduction, ça énerve grave le spectateur de bonne composition qui commençait à être bercé par la musique de Morricone et par la mortalité ambiante. La fin rattrape un peu le tout, enfin l’amitié entre Giuliano Gemma et Mario Adorf commence à être crédible, enfin Giuliano Gemma montre ses failles, enfin l’humanité des personnages transparaît. Mais c’est trop tard, on a le sentiment que le film est parti dans la mauvaise direction, malgré un réalisateur de talent (La mort était au rendez-vous, Tepepa), malgré Giuliano Gemma, malgré Ennio Morricone, et en dépit d’un titre français magnifique et d’une intro flamboyante. Tant pis, c’est toujours ça de pris !
Où le voir : DVD studio Canal. Chez Studio Canal, ils ont vraiment bien pris le pli de chez Evidis. Le résumé de la jaquette n’a en effet rien à voir avec l’intrigue ! Encore un petit effort les gars : mettez aussi des photos d’illustration qui proviennent d’un autre film et vous arriverez enfin au niveau de qualité Evidis. Par contre il faudra baisser un peu le prix aussi, sinon, on joue plus !