Je dois bien avouer que le titre en anglais de ce roman d’Elif Shafak, « The Forty Rules of Love », me faisait un peu peur, mais vu le nombre d’avis positifs j’ai fini par craquer.
« Soufi, mon amour » ne livre pas une, mais deux histoires qui s’entrelacent au fil des chapitres. Il y a tout d’abord l’histoire d’Ella Rubinstein, 40 ans, qui a consacré sa vie à son mari et ses enfants, au détriment d’un amour, de plus en plus absent. Mais il y a surtout ce roman d’Aziz Zahara, «Doux blasphème», qu’elle reçoit à lire et qui narre la formidable rencontre entre Shams de Tabriz et Rûmi au 12ème siècle.
Le roman aurait sans doute très bien pu se passer du récit de cette maîtresse de maison en manque d’amour, qui ne casse pas trois pattes à un canard. Heureusement, cette lacune est largement compensée par les passages dédiés à ces deux grands noms du soufisme, dont on découvre progressivement la vie. Des pages aux allures de conte oriental qui n’ont rien à envier aux célèbres contes des « Mille et Une Nuits ».
On oublie donc très vite les déboires affectifs de cette américaine au 21ème siècle, pour se plonger avec bonheur au milieu de personnages hauts en couleurs, allant de Suleiman l’ivrogne, à Rose du Désert la prostituée, mais emmenés par le poète persan Rûmi, ainsi qu’un Shams de Tabriz absolument irrésistible. Ce derviche errant débordant de sagesse ne se contente pas de nous éclairer concernant le « soufisme », cette branche spirituelle de l’Islam qui se concentre sur la dimension intérieure tout en prêchant l’amour et la tolérance, mais il parsème également de nombreuses leçons de vie qui invitent inévitablement à s’interroger sur le sens de notre propre existence.
Un merveilleux conte oriental que j’ai refermé en ayant l’impression d’être devenu une meilleure personne… juste une impression hein, je vous rassure très vite !
Soufi, mon amour, Elif Shafak, Phébus, 416 p.
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