Ce roman ayant eu un gros succès public à sa sortie, je me demandais un peu ce qu’il pouvait valoir, sans a priori particulier. C’est finalement grâce à mon cercle de lecture que ma curiosité a été exaucée et, après coup, je me dis que ce n’était pas indispensable. Mais bon ! Au moins, maintenant, je vois de quoi il s’agit.
Note Pratique sur le livre
Éditeur : Finitude
Année de publication : 2015
Nombre de pages : 159
Quatrième de Couverture
Sous le regard émerveillé de leur fils, ils dansent sur « Mr. Bojangles » de Nina Simone. Leur amour est magique, vertigineux, une fête perpétuelle. Chez eux, il n’y a de place que pour le plaisir, la fantaisie et les amis.
Celle qui donne le ton, qui mène le bal, c’est la mère, feu follet imprévisible et extravagant. C’est elle qui a adopté le quatrième membre de la famille, Mlle Superfétatoire, un grand oiseau exotique qui déambule dans l’appartement. C’est elle qui n’a de cesse de les entraîner dans un tourbillon de poésie et de chimères.
Un jour, pourtant, elle va trop loin. Et père et fils feront tout pour éviter l’inéluctable, pour que la fête continue, coûte que coûte.
L’amour fou n’a jamais si bien porté son nom.
Note biographique sur l’auteur
Olivier Bourdeaut est né en 1980 à Nantes. Il a longtemps hésité avant de se mettre à écrire, se sentant tout petit devant sa bibliothèque. En attendant Bojangles est son premier roman, publié à l’âge de 35 ans.
(Source : éditeur en 2015)
Mon Avis
J’ai failli abandonner cette lecture autour de la centième page parce que ça me paraissait vraiment exécrable. Et puis j’ai quand même eu raison de continuer car la fin est pas mal, même si on s’y attendait, mais c’est assez bien raconté et il y a de l’émotion. Je pense que l’auteur se tire beaucoup mieux des passages tristes que des épisodes prétendument joyeux, festifs ou humoristiques, qui sont tous aussi ratés et affligeants les uns que les autres.
C’est un roman qui est censé parler de la folie mais, visiblement, l’auteur ne sait rien sur ce sujet. D’ailleurs, lorsqu’il fait intervenir des psychiatres pour poser un diagnostic sur la mère c’est à la fois « hystérie, bipolaire et schizophrénie », ce qui tend à prouver que l’auteur se fout de la vraisemblance et de la réalité de la maladie psychique, pour nous infliger ses chimères fantaisistes. Quand il nous décrit un hôpital psychiatrique c’est du pur n’importe quoi, même pas un délire inspiré d’une situation plausible mais, vraiment, le grand n’importe quoi. C’est peut-être moi qui reste excessivement attachée à la réalité et au réalisme en littérature – et qui ne suis pas ouverte à la fantaisie et aux jeux de l’imagination – mais, en tout cas, ici, ça n’a pas du tout fonctionné pour moi. L’humour est tombé à plat à chaque fois.
J’ai trouvé par contre que l’écriture était parfois intéressante, surtout dans les trente ou quarante dernières pages, avec des recherches sur les sonorités et des effets de rimes à l’intérieur des phrases ou se répondant d’une phrase à la suivante. Évidemment, le procédé est un peu lassant au bout d’un moment, mais ça a tout de même un certain charme.
J’ai lu « En attendant Bojangles » juste après « Les Déraisons » d’Odile d’Oultremont (chroniqué vers la fin du mois dernier) et la ressemblance entre les deux m’a frappée. On voit bien que le livre de Bourdeaut a suscité toute une postérité, entraînant des tas de gens à surfer sur cette vague fantaisiste et irréaliste, d’un goût assez douteux ! Enfin, je ne conseille aucun de ces deux romans !
Un Extrait page 119
J’entendais bien le désarroi dans sa voix, je savais bien que pour une fois sa plaidoirie ne recelait aucune fantaisie, elle était malheureusement sérieuse, ses yeux s’étaient voilés afin d’observer intérieurement son monde en train de s’écrouler, et moi c’est sous mes pieds que je sentais le parquet se dérober. Alors que notre fils riait aux éclats en commençant à gribouiller sur du papier un arbre généalogique sans aucune logique, Colette me regardait comme on regarde un inconnu dans la rue, un inconnu que l’on croit avoir déjà vu. Le doigt tendu vers moi, la bouche ouverte et les sourcils froncés, prête à m’interpeller, elle était perdue. Colette dodelinait de la tête, en marmonnant des formules secrètes, et donnait l’impression de la secouer doucement pour remettre tout en place et retrouver la raison.
– Il faut que j’aille m’allonger un peu, je suis complètement au bout de la roulette, vous m’emberlificotez avec toutes vos sornettes ! avait-elle soufflé cependant qu’elle se dirigeait vers la chambre, la tête penchée pour observer sa main gauche triturer du pouce les lignes de sa main droite.
– Alors c’est qui Maman en fait ? C’est ma grand-mère ? Et Joséphine Baker c’est mon arrière-grand-mère ? Il va falloir m’expliquer pour mon croquis, parce que c’est un drôle d’arbre généalogique avec peu de branches et plusieurs têtes ! avait lancé notre garçon un crayon mâchonné entre ses dents.
– Tu sais, fiston, Suzon a beaucoup d’imagination, elle joue avec tout, même avec sa filiation, mais dans l’arbre, ta Maman, ce sont les racines, les feuilles, les branches et la tête en même temps, et nous, nous sommes les jardiniers, nous allons faire en sorte que l’arbre tienne debout et qu’il ne finisse pas déraciné, lui avais-je répondu par une métaphore confuse enroulée dans un enthousiasme forcé, tandis qu’il acceptait dubitativement sa mission sans la comprendre vraiment.
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Un Extrait page 139
Après le feu d’artifice, une grande et belle dame habillée de rouge et de noir était montée sur le perron de l’église pour chanter des chansons d’amour au cœur de son orchestre. Pour chanter plus fort, elle accompagnait ses paroles dans l’air en tendant les bras vers le ciel, ses chansons étaient tellement belles qu’on se demandait si elle n’allait pas se mettre à pleurer pour mieux les interpréter. Puis elle se mit à chanter des chansons joyeuses que tout le monde applaudissait en rythme en dansant, l’ambiance était électriquement magique. Comme des marionnettes, les silhouettes virevoltaient à en perdre la tête ; comme des toupies, les robes tournoyaient dans un brouillard de couleurs mêlées ; comme des figurines, les danseurs bougeaient en sautillant sur leurs ballerines. Avec leur costume de lumière en dentelle, leur teint mat et leurs grands yeux noirs, les petites filles ressemblaient à des poupées de musée, elles étaient terriblement belles, surtout l’une d’entre elles. (…)