The Sticky (Saison 1, 6 épisodes) : un Fargo au pays du sirop d’érable

Prime Video propose avec The Sticky une série unique en son genre, mêlant comédie et crime dans un décor pittoresque et rustique du Québec. Inspirée d'un événement réel - le vol de plusieurs milliers de tonnes de sirop d'érable au début des années 2010 -, cette production joue sur les contrastes entre la gravité de son sujet et le ton résolument léger adopté tout au long des six épisodes. À travers un mélange habile de personnages excentriques et de situations improbables, The Sticky s'impose comme un divertissement rafraîchissant, mais pas dénué de quelques bémols. Le point de départ de The Sticky repose sur un fait divers qui semble trop absurde pour être vrai : une bande organisée a dérobé des milliers de tonnes de sirop d'érable pour un profit faramineux, remplaçant leur butin par de l'eau.

Au mépris d'un système cruel, Ruth Landry, une productrice de sirop d'érable, réunit une équipe pour entreprendre le casse du siècle au Canada. La cible : un surplus de sirop d'érable d'une valeur de plusieurs millions de dollars.

Si cette anecdote historique pourrait alimenter un drame sombre ou un thriller, la série fait un choix audacieux : celui de l'humour et de la légèreté. Contrairement à ce qu'on pourrait attendre d'une adaptation fidèle, The Sticky ne cherche pas à retranscrire fidèlement cette histoire. Elle préfère l'utiliser comme toile de fond pour explorer les failles humaines, les motivations parfois absurdes et les liens improbables qui se tissent entre ses personnages. Le résultat est une série qui ne se prend jamais trop au sérieux, mais parvient tout de même à captiver. Dans le rôle principal, Margo Martindale incarne Ruth Landry, une productrice de sirop d'érable au bord du gouffre financier. Avec son mari dans le coma et une association dominée par un dirigeant tyrannique qui cherche à l'évincer, Ruth décide de prendre son destin en main.

Ce personnage, à la fois rusé, vulnérable et déterminé, est porté avec brio par Martindale, qui réussit à insuffler une profondeur inattendue à une femme prise dans des circonstances rocambolesques. L'une des forces de The Sticky réside dans la capacité de Martindale à passer d'une scène touchante - où la solitude de Ruth face à ses épreuves est palpable - à des moments de comédie où son intelligence et son humour transpercent. Les réalisateurs Michael Dowse et Joyce Wong savent tirer parti de chaque micro-expression de l'actrice, capturant son visage fascinant dans des plans qui oscillent entre l'amusant et l'artistique. Aux côtés de Ruth, deux acolytes improbables viennent compléter une équipe aussi dysfonctionnelle qu'irrésistible. Remy Bouchard, joué par Guillaume Cyr, est un agent de sécurité frustré qui connaît les failles du système qu'il est censé protéger.

Déjà impliqué dans de petites magouilles, il est l'élément clé pour faire passer le plan de Ruth à l'étape supérieure. Cyr apporte une dose d'authenticité et d'humour à un personnage qui pourrait facilement sombrer dans la caricature. Chris Diamantopoulos, quant à lui, incarne Mike Byrne, un gangster raté originaire de Boston, qui semble tout droit sorti d'un univers cartoon. Ses choix d'accent décalés et son énergie légèrement chaotique apportent une dynamique singulière au trio. Si ses tentatives de grandeur se heurtent souvent à la réalité, ses interactions avec Ruth et Remy sont un véritable régal. Ensemble, ces trois personnages naviguent entre des mini-crimes et des situations absurdes qui rappellent les premières saisons de Breaking Bad, mais en version délibérément plus légère.

Leurs maladresses et leurs plans bancals donnent lieu à des moments hilarants, mais aussi à des instants où la camaraderie et l'humanité transparaissent. La mise en scène de The Sticky est à la fois énergique et contemplative. Les réalisateurs savent équilibrer les scènes pleines d'action (ou de tentatives d'action) avec des moments plus calmes où les personnages ont l'occasion de respirer. Cela permet d'approfondir leurs motivations et de rendre leurs aventures encore plus engageantes. Le décor de la série, un village reculé du Québec, est magnifiquement exploité. Les paysages enneigés et les bâtiments rustiques renforcent l'atmosphère authentique et offrent un contraste saisissant avec l'ampleur du crime que les personnages cherchent à commettre.

La bande originale, avec ses reprises françaises de classiques rock des années 60, ajoute une touche nostalgique et charmante qui sied parfaitement à l'ambiance générale. Si The Sticky brille par ses personnages et son ton léger, tout n'est pas parfait. L'introduction de Bo, une antagoniste exagérément caricaturale interprétée par Jamie Lee Curtis, détonne par rapport au reste de la série. Son personnage, issu du passé trouble de Mike, semble ajouter un niveau de chaos inutile à une intrigue qui fonctionne déjà bien sans elle. Son interprétation, bien que pleine d'énergie, manque de finesse et pourrait diviser les spectateurs. De plus, l'approche linguistique de la série peut déstabiliser. Entre le français et l'anglais, The Sticky s'adresse à un public bilingue ou au moins habitué à jongler entre deux langues.

Pour certains, cela pourrait ajouter une couche d'authenticité ; pour d'autres, cela risque de compliquer la connexion avec l'histoire. Enfin, si la série amuse et divertit, son intrigue relativement mince pourrait laisser certains spectateurs sur leur faim. Le format court des épisodes et le ton léger ne permettent pas toujours d'explorer pleinement les enjeux ou les émotions des personnages. Prime Video a souvent tendance à ne pas mettre en avant ses productions originales qui sortent du cadre de ses grands succès comme The Boys. Malheureusement, The Sticky semble souffrir de ce manque de visibilité, ce qui pourrait limiter son audience. C'est regrettable, car la série mérite d'être découverte pour son originalité, son humour et ses performances d'acteurs.

Bien que la série ne semble pas destinée à devenir un phénomène mondial ou à accumuler les saisons, elle remplit parfaitement son rôle de divertissement léger. Sans prétention, mais avec beaucoup de cœur, elle offre une parenthèse agréable et parfois hilarante. The Sticky n'est peut-être pas une série révolutionnaire, mais elle a un charme indéniable. Portée par une Margo Martindale en grande forme et un casting secondaire solide, elle réussit à transformer une histoire improbable en une aventure attachante et amusante. Le mélange d'humour, de crime et de camaraderie fonctionne à merveille, malgré quelques faux pas.

pour ceux qui cherchent une série à l'atmosphère légère, dans un décor dépaysant et avec des personnages mémorables, Note : 7/10. En bref, The Sticky est une recommandation évidente. À condition d'accepter ses imperfections, elle saura séduire les amateurs de comédies décalées et les curieux intrigués par ce casse tout sauf ordinaire.

Disponible sur Amazon Prime Video