C'est la clé de voûte du néolibéralisme en général et du micronisme en particulier. Comment vous allez pouvoir le constater dans cet article, cette théorie… n'a jamais eu aucune réalité économique. En revanche, elle a toujours servi à cautionner ce que le gouvernement donne aux riches et à diminuer ce qu'il accorde aux pauvres. Contrairement à ce que clame Micron depuis qu'il est au pouvoir, la richesse des riches est directement proportionnelle à la pauvreté des pauvres. Pour le dire simplement, plus on enrichit les riches et plus les pauvres s'appauvrissent. Il suffit d'avoir un budget pour le comprendre et tout le monde a un budget à régir : plus vous consacrez une partie de votre budget à quelque chose ou à quelqu'un, moins il restera d'argent pour le reste de votre budget. Ou encore : l'eau peut ruisseler naturellement, l'argent jamais ! Avec Perplexity, nous avons écrit un article sur le mythe du ruissellement.
Le Mythe du Ruissellement
La théorie du ruissellement, ou « trickle-down economics» en anglais, est une notion économique controversée selon laquelle favoriser l'enrichissement des plus aisés profiterait à l'ensemble de la société. Bien qu'aucun économiste ne s'en réclame officiellement, cette idée continue d'influencer certaines politiques fiscales et économiques, suscitant de vifs débats sur son efficacité réelle.
Origines historiques du concept
Le concept de « ruissellement économique" trouve ses origines dans les années 1930, bien que le terme lui-même n'ait été popularisé que plus tard. L'humoriste américain Will Rogers est généralement crédité comme étant le premier à utiliser cette métaphore en 1932, critiquant les politiques du président Herbert Hoover face à la Grande Dépression.
L'expression a gagné en notoriété dans les années 1980, principalement comme une critique des politiques économiques de Ronald Reagan aux États-Unis et de Margaret Thatcher au Royaume-Uni.
Le terme « trickle-down» est apparu pour la première fois dans son sens économique en 1944, selon le dictionnaire Merriam-Webster. L'idée sous-jacente - que la prospérité des classes supérieures finit par profiter aux classes inférieures - remonte au moins à un siècle.
Les "Reaganomics" des années 1980 ont mis en pratique ces principes, réduisant considérablement les taux d'imposition marginaux.
En France, le débat sur le « ruissellement » a resurgi récemment, notamment avec la suppression de l'ISF sous la présidence d'Emmanuel Micron.
Critiques des économistes contemporains
Les critiques des économistes contemporains contre la théorie du ruissellement sont nombreuses et étayées par des études empiriques. Joseph Stiglitz, prix Nobel d'économie, affirme que cette théorie a échoué à tenir ses promesses d'amélioration du niveau de vie.
Selon lui, la concentration croissante des richesses au sommet de l'échelle n'a pas entraîné les bénéfices escomptés pour l'ensemble de la société.Des études menées par des institutions comme le FMI et l'OCDE ont mis en évidence un lien négatif entre les inégalités et la croissance économique
Par exemple, une augmentation de 1 % de la part des revenus détenus par les 20 % les plus riches serait associée à une baisse de la croissance économique. Ces constats remettent en question l'efficacité des politiques fiscales favorisant les plus aisés et soulignent la nécessité de considérer d'autres approches pour stimuler l'économie et réduire les inégalités.
Impact des baisses d'impôts sur les inégalités
Les baisses d'impôts ont généralement tendance à accroître les inégalités plutôt qu'à les réduire. Une étude de l'Institut des politiques publiques (IPP) sur le quinquennat 2017-2022 en France a montré que les réformes fiscales ont surtout profité aux plus aisés.
Les 5 % les plus pauvres n'ont tiré aucun bénéfice des mesures prises, leur niveau de vie a même diminué pour certains. Le 1 % le plus riche a vu ses revenus après impôts progresser de près de 3 %.
Pour la majorité de la population, l'amélioration des revenus a été de l'ordre de 1 % à 2 % annuels. La transformation de l'impôt sur la fortune en impôt sur la seule fortune immobilière et la réduction de l'imposition des revenus financiers ont principalement profité aux très riches. À l'inverse, les hausses de taxes sur le tabac et l'énergie ont davantage pesé sur le budget des ménages les plus modestes.
L'OCDE souligne que l'incapacité à améliorer l'efficacité de l'imposition au sommet de l'échelle des revenus et du patrimoine pourrait non seulement altérer la perception de l'équité, mais encore creuser les déficits de recettes.
Évolution de l'indice Gini
L'indice de Gini est un indicateur statistique largement utilisé pour mesurer les inégalités au sein d'une population. Il varie de 0 à 1, où zéro représente une égalité parfaite (tous les individus ont le même niveau de richesse ou de revenu) et une inégalité totale (un seul individu possède toute la richesse). Plus l'indice est élevé, plus les inégalités sont importantes. En France, l'évolution de l'indice de Gini lors des 30 dernières années révèle des tendances distinctes pour le patrimoine et le niveau de vie : pour le patrimoine, l'indice de Gini a connu une augmentation significative, passant de 0,639 en 1998 à 0,662 en 2021.
Cette hausse indique un accroissement des inégalités de patrimoine sur cette période. La concentration du patrimoine s'est accentuée, avec les 10 % les plus fortunés qui détiennent désormais, 47 % du patrimoine total des ménages, contre 41,3 % en 2010.
Concernant le niveau de vie, l'évolution de l'indice de Gini montre une tendance différente. Après une période de relative stabilité dans les années 1990, l'indice a augmenté à partir de la fin des années 1990 jusqu'à atteindre un pic de 0,298 en 2011. En 2022, il s'établit à 0,294.
Bien que cette augmentation soit moins prononcée que pour le patrimoine, elle indique néanmoins une légère hausse des inégalités de niveau de vie sur les trois dernières décennies.Il est important de noter que l'indice de Gini pour le niveau de vie (0,294 en 2022) est nettement inférieur à celui du patrimoine (0,662 en 2021), ce qui traduit une répartition beaucoup plus inégalitaire du patrimoine que des niveaux de vie.
Ces chiffres mettent en lumière une dynamique préoccupante : alors que les inégalités de niveau de vie ont connu une augmentation modérée, les inégalités de patrimoine se sont creusées de manière plus marquée. Cette divergence s'explique en grande partie par la forte hausse des prix de l'immobilier, qui a principalement profité aux ménages déjà propriétaires, ainsi que par l'évolution des marchés financiers, favorisant les détenteurs de capitaux.
La persistance et l'aggravation de ces inégalités soulèvent des questions importantes sur l'efficacité des politiques de redistribution et l'impact à long terme sur la cohésion sociale et la mobilité économique en France.
Échec du ruissellement micronien
La persistance et l'aggravation des inégalités en France remettent sérieusement en question la théorie du ruissellement défendue par Emmanuel Micron. Cette théorie, qui justifie des politiques fiscales favorables aux plus riches, se heurte à la réalité des chiffres et des études économiques récentes.
Depuis son élection en 2017, Emmanuel Micron a mis en place plusieurs mesures fiscales s'inspirant de cette théorie, notamment la suppression de l'ISF et l'instauration d'une « flat tax » sur les revenus du capital. Ces réformes étaient censées stimuler l'investissement et profiter à l'ensemble de l'économie.
Cependant, les résultats observés sont loin d'être concluants. Un rapport de France Stratégie publié en 2021 a évalué l'impact de ces réformes et n'a pas pu identifier d'effets économiques positifs significatifs.
Le seul effet explicitement observé a été une augmentation substantielle des dividendes versés aux actionnaires les plus fortunés. Cette hausse des revenus du capital n'a pas été accompagnée d'une augmentation proportionnelle des investissements ou de la création d'emplois, comme le prédisait la théorie du ruissellement.
De plus, une étude de l'Institut des politiques publiques (IPP) sur le quinquennat 2017-2022 a montré que les réformes fiscales ont principalement profité aux plus aisés, avec une augmentation de près de 3 % des revenus après impôts pour le 1 % le plus riche, tandis que les 5 % les plus pauvres n'en ont tiré aucun bénéfice, voire ont vu leur niveau de vie diminuer.
L'aggravation des inégalités de patrimoine, comme le montre l'évolution de l'indice de Gini passant de 0,639 en 1998 à 0,662 en 2021, témoigne de l'inefficacité de ces politiques à réduire les écarts de richesse. Cette concentration accrue du patrimoine entre les mains des plus fortunés va à l'encontre des promesses de la théorie du ruissellement. La London School of Economics a également mené une étude démontrant que les politiques de réduction d'impôts pour les plus riches n'ont pas généré la croissance et l'emploi escomptés, mais ont plutôt contribué à accroître les inégalités.
Ces constats remettent fondamentalement en question la pertinence de la théorie du ruissellement comme guide pour les politiques économiques. Ils suggèrent que des approches alternatives, axées sur une redistribution plus directe et des investissements ciblés dans les services publics et l'éducation, pourraient être plus efficaces pour stimuler la croissance économique tout en réduisant les inégalités.En persistant à défendre cette théorie malgré les preuves contraires, Emmanuel Micron s'expose à des critiques croissantes sur l'efficacité et l'équité de sa politique économique.
La question se pose désormais de savoir si ces politiques ne servent pas davantage à justifier des avantages fiscaux pour les plus riches qu'à générer une prospérité partagée pour l'ensemble de la société française.