"L'intelligence de la main: faire dire à la matière qu'elle vaut mieux que le réel" Sylvain Tesson.
La vérité est qu'elle peint comme elle vit, en riant et en gloussant devant la beauté du monde.geste: Frantz-Olivier Gisbert aime la peinture de Laurence Bost. Elle est la peintre qui fait du bien . Il dit aussi qu'elle est la peintre du mouvement, du elle immortalise ainsi les artisans qui, avec leurs matériaux et leurs outils, ont redonné vie à la cathédrale.
Pour s'en convaincre, le lecteur, devenu visiteur, parcourra avec bonheur ce volume illustré où sont reproduits quarante-et-un tableaux de l'artiste, seule accréditée pour peindre les artisans au travail. Francesca Montovani les a photographiés avec amour.
Adélaïde de Clermont-Tonnerre dit de ces tableaux:
Ce qui frappe, c'est l'intensité des regards, l'attention entière, la pensée que chaque artisan insuffle à son travail et aux objets qu'il crée ou restaure. [...] Un dialogue se noue entre l'oeuvre et celui qui la guérit.Sylvain Tesson est frappé par un même détail :
Tous ces artisans [...] semblent accueillir sur leur visage la même expression de recueillement, un semblable rayonnement d'attention, de sérieux - aux limites, parfois de la douleur. Ils sont penchés sur leur grand oeuvre.Il ajoute, plus loin:
Pour ces raisons: silence, solitude, sertissage dans la fluctuation du temps, répétition des formes établies, effacement de soi devant ce qui est supérieur à soi, le geste de l'artisan s'apparente à la prière. La prière ne prétend rien inventer, elle reproduit l'écho de la même vibration.Bertrand Vergely dit que Laurence Bost a été mise face à une évidence :
Il était manifeste que tout ce qui était en train de se faire était un tableau et qu'il fallait le montrer. Le tableau du chantier n'était pas à faire. Le chantier était le tableau. [...] Derrière le chantier, les hommes et des femmes au travail, elle sait voir une grande pensée sous la forme d'une attention conduisant à une extrême précision.L'ouvrage comprend les témoignages de plusieurs de ces artisans, qui le confirment. Le sculpteur sur pierre Philippe Giraud dit qu'ils s'inscrivent dans la longue lignée des gardiens du gesteet pose la question:
Et si notre prochain défi était la sauvegarde de ces gestes?L'ouvrage se termine par un glossaire des métiers. Afin d'en donner un aperçu, voici quelques débuts de définitions:
Cordiste: Le cordiste est le spécialiste des travaux en hauteur et des accès difficiles. Harnaché et suspendu au bout d'une corde, il intervient là où grue, nacelle ou échafaudage ne suffisent plus...
Dinandier: Le dinandier réalise des pièces uniques en cuivre, en laiton, en étain ou en argent par martelage d'une feuille de métal...
Rentrayeur: Il répare les déchirures dans les étoffes. Pour cela, il joint bord à bord deux morceaux par une couture invisible...
Enfin les légendes des quarante-et-un tableaux sont dues à Sylvain Tesson. Le dernier représente le Général Jean-Louis Georgelin qui a dirigé le chantier de Notre-Dame de Paris jusqu'à sa mort en 2023. Il est ainsi légendé:
vaisseau La cathédrale pour (selon Péguy). Un général pour capitaine.
Francis Richard
Les gardiens du geste sur le chantier de Notre-Dame de Paris, Laurence Bost, 114 pages, Gallimard