La critique
Dans une Belgique grisâtre, Lorna (Arta Dobroshi) partage sa vie avec Claudy (Jérémie Rénier), un junkie. Ce dernier passe son temps à promettre qu’il va arrêter de se droguer avant de replonger. Couple en crise ? Seulement en apparence : Lorna s’est mariée avec Claudy pour obtenir la nationalité belge. Elle ne l’a jamais aimé, ses sentiments sont réservés à Sokol, un petit escroc avec qui elle rêve de partager sa vie et d’acheter un snack. Sokol n’est jamais là, elle passe donc son temps à l’attendre et prépare un nouveau coup avec son associé Fabio. Ce dernier est en train de planifier un nouveau mariage pour Lorna, avec un russe désireux de devenir belge et prêt à payer une forte somme d’argent. Logiquement, il va alors falloir que Claudy disparaisse. Fabio et Lorna espèrent ainsi qu’à force de se droguer, le jeune homme fasse une overdose. Mais voilà que pour la première fois Claudy résiste à la tentation. Touchée par les efforts de son concubin, Lorna commence à regretter ses actes. Mais il est peut être déjà trop tard…
Il ne faut que quelques secondes pour se sentir à nouveau imprégné du cinéma social des Frères Dardenne. Réalisation sobre, réaliste, au plus près des personnages et de leur quotidien. Les réalisateurs ont décidément le sens du casting puisqu’ils révèlent, une fois de plus, une jeune actrice bourrée de talent : Arta Dobroshi. Grâce à elle , Lorna trouve toute sa dimension. Paradoxale, difficile à cerner, sensible et en même temps vénale…Le spectateur est pourtant rapidement tenté de s’attacher au personnage et de suivre passionnément son avancée vers le vide. Car, on le sait, les sadiques trouvent toujours leur bonheur dans un film signé Dardenne. C’est la qualité et le défaut principal de leur cinéma : un schéma qui fonctionne mais qui a tendance à se répéter. On sait ainsi ,de suite, que la route de Lorna sera semée d’embuches et qu’elle va s’en prendre plein la tronche. En ce sens , pour les connaisseurs, le scénario aussi habile soit-il manque un peu de surprises.
Mais bien que l’on connaisse les règles du jeu, ce nouveau long-métrage fonctionne de bout en bout. Détresse sociale qui pousse au pire, rédemption quasi-impossible et destins brisés : Le silence de Lorna est un film noir , plombant, mais auquel il est difficile de résister. Quand on s’engage dans des plans machiavéliques, il faut être sûr de ne pas laisser de place au cœur. Lorna, pas encore assez désillusionnée, va faire les frais de sa compassion et en être définitivement traumatisée. Casting parfait, réalisation aussi fluide que le scénario est brutal : Le silence de Lorna est un très bon moment de cinéma.