Pourquoi John Lennon n’aimait pas Abbey Road, le chef-d’œuvre des Beatles

Publié le 20 novembre 2024 par John Lenmac @yellowsubnet

De loin, John Lennon a été le plus grand critique des Beatles. Bien que son partenariat avec Paul McCartney dans les Fab Four ait atteint une perfection incontestable à de nombreuses reprises, Lennon n’était pas tendre dans son jugement. Malgré une carrière d’enregistrement qui a duré moins d’une décennie, les Beatles n’ont cessé d’évoluer, évitant de reproduire les mêmes schémas et préférant expérimenter, ce qui leur a valu les fruits de leur audace en studio.

Après avoir cessé les tournées en 1966, les Beatles ont eu plus de temps pour peaufiner chaque album, veillant à ce qu’il soit meilleur que le précédent. De plus, les contributions croissantes de George Harrison ont enrichi encore davantage leurs créations musicales.

Peu de groupes tirent leur révérence avant que leur talent ne commence à décliner, mais les Beatles l’ont fait de manière spectaculaire avec leur dernier album studio emblématique, Abbey Road. C’est un disque que peu oseraient critiquer, sauf Lennon.

Bien qu’ils soient encore capables de créer de la magie en studio, des divergences créatives avaient commencé à apparaître, précipitant leur séparation. Par ailleurs, Lennon luttait contre une dépendance à l’héroïne, ce qui a réduit sa participation à Abbey Road et probablement biaisé son jugement sur l’album.

Les critiques de Lennon envers Abbey Road

La contribution majeure de Lennon à l’album est ‘Come Together’, qui ouvre le disque et reste un moment fort. Cependant, il a surtout travaillé dans l’ombre, tandis que Harrison s’imposait avec brio grâce à ‘Here Comes The Sun’ et ‘Something’. Si Lennon a toujours conservé une affection particulière pour ‘Come Together’, il n’en va pas de même pour le reste de l’album.

La seconde face d’Abbey Road, avec son aspect opératique, a particulièrement agacé Lennon. Il souhaitait que le groupe reste ancré dans le rock ‘n’ roll, et cette orientation sonore l’a rendu encore plus distant sur le plan créatif. Bien qu’ils aient jadis maîtrisé l’art du compromis, Lennon commençait à perdre patience.

Dans une interview accordée à Rolling Stone peu après leur séparation, Lennon n’a pas mâché ses mots : « J’ai aimé la face A, » a-t-il déclaré sans hésiter. « Je n’ai jamais aimé cette sorte d’opéra pop sur l’autre face. Je trouve que c’est du bric-à-brac. Ce n’était que des morceaux de chansons assemblés. Et je ne me souviens même pas de certaines. »

Lennon a également décrit cette partie de l’album comme « sans vie, vraiment ». Ces critiques ne se sont pas limitées à cette interview : Lennon a continué à dénigrer l’album à plusieurs reprises au fil des années. Peu avant sa mort, il a réitéré son avis dans une interview pour Playboy : « Tout le monde encense cet album. Mais aucune des chansons n’a de lien entre elles, aucun fil conducteur, si ce n’est le fait qu’on les ait collées ensemble. »

Les défis rencontrés par George Martin

Dans The Beatles Anthology, le producteur George Martin a évoqué les difficultés qu’il a rencontrées avec Lennon lors de l’enregistrement d’Abbey Road. Selon Martin, Lennon n’a jamais réellement adhéré au projet. Toutefois, la nature démocratique du groupe signifiait qu’il a suivi à contrecœur les souhaits des trois autres membres.

Pour Lennon, le son des Beatles devait revenir aux « vieux jours » : plus brut, moins axé sur les medleys et la production. Malheureusement pour lui, il s’est vite rendu compte qu’il était seul dans cette perspective, ce qui l’a poussé à chercher de nouvelles directions. Même s’il souhaitait un autre chemin pour l’adieu des Beatles, cela nous aurait privés d’un album classique.

Un chef-d’œuvre intemporel

Bien que la version d’Abbey Road imaginée par Lennon aurait pu être tout aussi magistrale, celle réalisée par les Fab Four reste un chef-d’œuvre musical intemporel. Elle marque l’endroit parfait pour mettre un point final à leur incroyable histoire.