Faire des hommes du marketing de supers commerciaux de l’entreprise : oui.
Le marketing risque t il d’y perdre son âme ?
A mon sens pas du tout et au contraire. J’y vois plusieurs avantages :
- En PME il y a traditionnellement une fusion entre le marketing de distribution et le marketing de développement (produit…) : c’est une très bonne chose. Le dirigeant de PME parle d’ailleurs de Marketing sans trop savoir exactement de quoi il en retourne. Si les choses n’ont pas été précisées à la prise de poste, je vous conseille fortement de le faire. Le développement produits, la définition du package de lancement, ainsi que l’analyse des performances produits et des performances commerciales doivent venir du marketing. L’avantage est évident. Proche du terrain et des distributeurs (Centrales ou magasins) les corrections au lancement deviennent quasi immédiates.
- Proche des négociations en Centrales d’achat, vos solutions intègrent immédiatement les contraintes du distributeur. Cet aspect est essentiel notamment pour tous les pb liés au merchandising qui est de plus encadré dans la grande distribution. Cette position vous permet aussi de bien apprécier les critères de performances linéaires mis en place par le distributeur. Attention la performance d’un produit n’est pas uniquement son CA ou sa Marge. La performance linéaire est un aspect essentiel. Sur ce point je voudrais vous recommander un excellent petit livre (rédiger par un ancien pilote de chasse…reconverti dans l’arithmétique du linéaire…). Ce bouquin est extraordinaire.
Je prends 5 mn pour développer ce point qui me semble très important. Comment apprécier la performance en linéaire d’un produit sans disposer de panel. Bon nombre de marché des Biens durables (B to C) ne disposent pas de panels de consommation comme on en trouve pour les produits de grande consommation. Il faut, par ailleurs, reconnaître le cout exorbitant de ces panels pour une PME. Alors comment faire pour avoir une information régulière sur la performance de vos produits en linéaire?
Les ERP dont nous disposons aujourd’hui dans les entreprises sont des mannes d’informations extraordinaires. A partir d’une seule donnée interne et sans remontée commerciale (EDV) vous avez les moyens de construire des indicateurs grossiers mais suffisamment performants pour avoir une image réaliste des performances de vos produits en linéaire… (soyons malins…).
A partir d’un magasin test, vous devez obtenir la rotation moyenne de votre produit. Ensuite tout devient un jeu d’enfant en observant le réassort ou pas du magasin. Il vous suffit ensuite de bien analyser vos taux de présence et taux de mise en place (attention c’est différent) et c’est gagné. La performance produit devient très facile à analyser quant à la performance magasin il vous suffit de croiser la surface du magasin (très facile à obtenir) ou mieux les mètres linéaires développés de la famille pour avoir une image réaliste de la performance du magasin.
Il est clair que vs n’aurez pas la performance des produits concurrents mais c’est déjà une indication très importante pour comprendre l’évolution du linéaire ou le cas échéant le déréférencement d’un produit.
A plusieurs occasions j’ai pu utiliser ces indicateurs « maisons » qui ce sont révélés très fiables pour avoir un éclairage objectif des décisions prises par certains acheteurs de la grande distribution. Ces indicateurs se sont révélés aussi très intéressants pour piloter l’action des commerciaux (EDV) qui corrigeaient la performance de vente de certaines références (par des actions promotionnelles locales par exemple) pour maintenir le curseur au dessus de la position critique et garantir ainsi notre référencement national…
- Mieux informé, vous intégrerez dans vos développements futurs les aspects stratégiques propres à chaque distributeur. Vous accroissez ainsi les chances de référencement du Compte Clé.
- Proche du terrain, vous vous placez dans une situation privilégiée pour concevoir des offres tactiques pour corriger des dérives ou bloquer un concurrent par exemple.
- Imprégné de votre marché, vous allez acquérir cette fameuse « sensibilité commerciale » (…) et vous devenez l’équipier indispensable du commercial qui ne vous ressent plus comme un censeur de son activité mais comme un personnage qui construit avec lui sa performance future.
- Autre avantage est de pouvoir identifier des magasins pilotes qui vous serviront pour des tests futurs. La qualité de la relation que vous pourrez bâtir avec le directeur du magasin par exemple, peut vous permettre de gagner énormément de temps…
Je reconnais que pour les grosses structures il sera plus complexe de mettre en place ce dispositif. Notamment quand le poids de l’export devient important dans le CA. Il convient alors de dissocier un Marketing de développement dans le pays d’origine (maison) et un Marketing de distribution délocalisé dans chaque pays. Mais là encore, il faudrait que le lien hiérarchique entre le marketing de distribution (filiale) et le marketing de Développement soit direct. Ce marketing de distribution n’ayant qu’un lien fonctionnel avec la Direction Générale locale du pays (filiale). Cette dépendance hiérarchique n’enfermerait pas le Responsable marketing dans une seule logique commerciale qui peut être dramatique pour l’entreprise. A trop enfermer le marketing dans le très court terme on finit par courir après les concurrents. Le seul argument devient le prix et uniquement le prix…
Contrairement à l’observation que l’on fait sur les biens durables et leur standardisation quelques soit le pays, les hommes de marketing doivent retrouver ce leadership créatif par pays. L’individualisation des produits et des services est une tendance lourde pour les décennies qui viennent. C’est une erreur stratégique que de croire qu’un seul produit répondra à toutes les attentes du marché. Force est pourtant de constater que pour les biens durables le poids de l’industrie est encore déterminant.
Il faut que de nouvelles organisations voient le jour pour garantir ce besoin de diversité de l’Offre et les impératifs industriels de rentabilité.