Magazine
Nous nous levons tôt. Le programme ? Tout faire, tout voir de la capitale ! Nous optons pour les transports en commun. Le bus dévale les pentes qui mènent au quartier de Belém en traversant des quartiers résidentiels. Le terminus se fait sur la place du commerce, une vaste esplanade qui fut reconstruite lors du tremblement de terre qui détruisit la ville en 1755. Les riches négociants enrichis par le commerce maritime financèrent cette reconstruction et la place fut nommée « placa del commercio » en leur honneur.
A peine à quelques mètres de là, la place du Rossio est le poumon de la ville. Il faut se concentrer pour tenter d’imaginer la vie ici, à travers les siècles. Nous tentons de comprendre l’histoire de cette place munis d’un excellent guide (Lisbonne et sa région de Claire Beaudouin qui vit à Lisbonne depuis 1977).
C'est avec bonheur que nous avons suivi les chemins de traverse et les ballades thématiques proposent ce guide. Et ... nous avons adoré. Ce fut une véritable découverte de la ville, tranquille, érudite, anecdotique, diverse et ... ludique. En effet, c'est une chose de lire le guide avant de partir. C'en est une autre de tenter de suivre l'itinéraire proposé. En plus, nous nous y sommes pris comme des pieds car nous n'avions pas de carte de la ville. Ce fut l'occasion de demander notre chemin aux habitants de la ville et de nouer ainsi le dialogue.
C'est exactement le type de guide dont j'aurai rêvé pour visiter les autres capitales.
Claire Beaudouin propose également un site Internet très bien fait qui permet de découvrir la ville grâce à des approches variées. Il fait bon y surfer et s’y perdre comme l’on peut le faire dans les rues des quartiers de la ville.
L’église Saint-Dominique, les deux fontaines et la statue, l’église Saint-Louis des Français, ...
C’est dans ce guide que nous apprenons que le maréchal ayant la charge des condamnés aux travaux forcés du château Saint-Georges « eut l’idée, pour meubler leurs journées sans fin, de faire venir des maîtres paveurs qui allaient leur apprendre à jouer de petites pierres taillées de calcaire et de basalte afin de créer des dessins, en raffinant les contrastes. Cet art était totalement inconnu car, jusqu’alors, on pavait avec les galets ramassés sur la place. »
Nous nous faisons cirer les chaussures. Le cireur s’applique, prend son temps. Il choisit la bonne couleur de cirage dans sa large palette, pose une première couche, astique, répète l’opération. Il cire le talon de gomme noire, brosse. Puis une deuxième couche. A ses côtés, un vieux lisboète a installé un stand de plastification de documents administratifs sur une table pliante. Nous le regardons travailler. Ses gestes sont rapides, précis, ordonnés et le résultat probant. Devant nous, deux policiers municipaux traversent la place du Rossio sur de drôles d’engins électriques à deux roues
La place du Rossio est le départ idéal pour une excursion de la ville. Les anciennes échoppes ont été remplacées par des enseignes multinationales. Seules quelques commerces isolés semblent résister aux assauts de la modernité.
Ainsi, ce chapelier que l’on dit le dernier de la ville. A l’intérieur, tout n’est qu’élégance, des cannes aux bois sculptés aux imposants cartons à chapeaux. Dans la vitrine, des panamas côtoient des Stetsons.
Sur la place du Rossio, les salariés pressés croisent des touristes, le nez en l’air. Beaucoup sont français. Le terme « rossio » désigne un terrain étendu. Cette place date du XIIIème siècle.
Vendredi
Le mythique quartier de Belém, lieu de départ et d’arrivée des grands explorateurs comme Vasco de Gama. Une belle destination pour cette journée qui débute par un beau soleil sous fond de ciel bleu. La tour de Belém se détache, blanche. Elle tranche avec l’azur du ciel.
Les guides l’avaient conseillé : il faut venir au petit matin pour visiter le quartier, avant que les cars ne déversent leurs flots de touristes à caquettes de base-ball et à short, que les marchands ambulants ne s’installent. Malgré l’heure matinale, ceux que l’on appelle les « cars angels » guident les voitures vers les places vides et quémandent une pièce en échange de la « surveillance » du véhicule. Les guides affirment que ceux qui ne leur donnent rien s’exposent à voir leur véhicule endommagé (rayures, pneus crevés). La vérité ? Nous ne la connaissons pas et nous préférons ne pas vérifier la véracité de ces propos. Aussi, nous cédons lâchement à ce chantage qui prend place sous la barbe des policiers qui les observent en se marrant.
Plus loin, le long de l'avenida de Brasilia, on peut admirer le monument des découvertes (« Padrão dos Descobrimentos »): une guirlande de trente trois héros nationaux sont tournés vers les eaux du Tage Cette sculpture représente la proue d’un navire prêt à partir pour le large. Les travaux débutèrent en 1940 à l'occasion de l'exposition mondiale mais il ne fut inauguré qu’en 1960 pour la célébration des cinq cent ans de la mort de l'infant Enrique, surnommé Henri le navigateur (qui inventa au XVème siècle, un navire nouveau, plus rapide et plus maniable : la caravelle).
Le torse gonflé des grands hommes de la nation sont emplis du sentiment de fierté nationale et cette construction est empreinte de l’esprit glorifiant du régime fasciste de Salazar.
Si le pays a la volonté de tourner la page de ce passé lourd, il subsiste ici et là dans la capitale des vestiges de cette période. Il suffit de lever le nez pour contempler le pont Salazar qui fut rebaptisé « pont du 25 avril » après la révolution des oeillets.
A quelques mètres se dressent le grandiose monument qu’est le monastère des Jeronimos, « authentique chef d’œuvre de pierre que visitent tous les touristes et qu’ils n’oublient jamais. Il s’agit, disons le, du monument le plus remarquable de la capitale » selon Fernando Passoa.