Le jeune étudiant en droit, Eugène Rastignac s'acharnera à sortir de sa condition, quitte à s'élever grâce à une femme. Et s'il estrabroué par l’une, il séduira l’autre tout en s'appuyant sur une troisième, sa bonne marraine Madame de Beauséant.
On a un peu de mal à se laisser envahir par le tourbillon qui agitait Paris au XIX° oscillant entre la flamboyance des riches et la misère des pauvres. Les descriptions minutieuses de Balzac sont occultées en raison d’un décor fait de grilles et découpé de clairs-obscurs et d’ombres (construits par le toujours génial éclairagiste Denis Koransky) dont l’intérêt est malgré tout d’instaurer de la froideur et de suggérer l’emprisonnement des personnages dans leurs ambitions ou leur pauvreté, à l'instar d'une musique parfois assourdissante.La scénographie de Charlotte Villermet nous éloigne du naturalisme de l’auteur tandis que les costumes qu’elle a également conçus fait hésiter notre œil entre les temps anciens et un certain modernisme, encore à l’œuvre au temps des trente Glorieuses quand les espoirs d’ascension sociale restaient permis.C’est astucieux car le roman est entièrement centré sur cet aspect. Le déterminisme social ne résiste pas à une ambition démesurée et libérée de tout frein moral. La sincérité amoureuse n'a guère de place en dehors des intérêts des uns et des autres. Place au jeu, au propre comme au figuré.Dans cette comédie de l'hypocrisie, si un mot ouvre les portes, il en ferme d’autres. La galerie de personnages est multiple. La bonne idée de David Goldzahl est d'abord d'avoir adapté ce roman-fleuve pour le resserrer à l'essentiel et ensuite d'avoir construit une distribution reposant sur seulement trois comédiens, Delphine Depardieu (tellement différente de al femme qu'elle joue dans Les liaisons dangereuses au même moment qu'on en est abasourdi), Jean-Benoît Souilh et Duncan Talhouët, chacun exceptionnel, qui vont nous donner le tournis grâce à une interprétation et une mise en scène qui tient de la bande dessinée.On se perdra, c'est voulu, car les apparences sont toujours trompeuses, n'est-ce-pas ? On redécouvre le cynisme de Balzac, à son paroxysme, jusqu'à en devenir drôle et nous faire oublier que c'est un drame qui se joue sous nos yeux.
Le Père Goriot
De Honoré de Balzac / Adaptation et mise en scène de David Goldzahl
Avec Delphine Depardieu, Jean-Benoît Souilh et Duncan Talhouët
Scénographie et Costumes : Charlotte Villermet
Lumières : Denis Koransky
Son : Xavier FerriAu Théâtre des Gémeaux Parisiens - 15 rue du Retrait - 75020 Paris
Du 23 Septembre 2024 au 31 Décembre 2024 Les lundis et mardis à 21h sauf le mardi 31 décembre à 18hRéservations par téléphone au 01 87 44 61 11