La rentrée littéraire. Des dizaines de livres qui s'offrent comme des friandises ou des médicaments. Au milieu de cet étalage d'apothicaire bibliothécaire, "Sans elle" d'Alma Brami. Je découvre la quatrième de couverture et une histoire qui me saute au visage. Le livre dans les mains, je sors de la librairie et entame une lecture vorace.
Cette histoire c'est celle de Léa, 10 ans, confrontée à la mort de sa petite soeur Solène. Au deuil impossible d'une mère qui perd un enfant et doit continuer à vivre pour celle qui reste. Pour celle qui reste, justement, le plus dur commence. Parce que Léa le dit avec ses mots d'enfant, on ne sait jamais vraiment pourquoi la mort fauche votre soeur plutôt que vous, on ne sait pas comment trouver sa place de vivante au milieu de ces souvenirs. Perte de repères, perte d'importance aux yeux d'un parent brisé par le chagrin et qui n'a plus de place que pour l'absente.
Léa va partir à la reconquête de l'amour de sa mère, de sa propre identité et essayer de surmonter son deuil.
Ce roman qui donne la parole à une petite fille est écrit par une jeune femme, Alma Brami, 23 ans, qui se défend d'être Léa. Mais qui sait avec justesse et sans tomber dans le pathos donner à cette fillette les clés pour nous faire comprendre, vivre ou revivre le difficile travail de survivant. Résister à la tentation de chercher à remplacer l'autre. Se faire une place au milieu des souvenirs d'une absente omniprésente, comme l'illustre cet extrait :
"Quand Solène est morte, j'ai compris que j'avais gardé la place la moins confortable. La vivante doit être parfaite, elle n'a pas le droit de se plaindre, pas le droit d'être triste, elle doit garder en tête, en permanence, sa condition de vivante. Et quand on a cette place, ne pas faire attention à soi, ou avoir envie de mourir est considéré comme une seconde mort pour celle qui est déjà partie. Le droit d'être en vie devient un devoir, le devoir d'être heureux pour apaiser les souffrances passées(...)"
Sans elle, Alma Brami, Editions Mercure de France