Loin d'Ophélie

Par Angèle Paoli


LOIN D’OPHÉLIE

Soleil du torrent gorgé de lumière, je m’illusionne de fraîcheur dans les reflets d’eau. Ondulations-miroitements de la peau sous l’ombrage, ronds de lucioles. Un dytique glorieux, ondoyant acrobate, gesticule pattes en croix, menues libellules or lullaby papillons des eaux émeraude. Le chant de la cascade rythme ma rêverie docile. Seules les guêpes ivres n’ont pas droit de cité sur la roche brûlante et lisse avide de rondeur. Le soleil glisse sous les eaux claires, vasques ombreuses qui appellent aux nonchalances. Dérives du désir, je hume la sérénité du lieu, ocelles mouvantes de lumière bercée par le plumetis d’un vent qui passe, friselis léger. Je lis. Une fourmi vagabonde arpente les veines bleues vibrantes sous la peau, moire chaude enivrée de soleil. Le ramage effilé des bruyères, hampes feutrées, s’allie aux mains offertes du figuier. Je savoure sauvage l’heure tiède, la rumeur fidèle de l’eau qui court de roche en roche, le plaisir rond de la sève de l’été. Je plonge loin du corps de la tendre Ophélie, loin des ses pleurs enfouis sous la mousse, le temps de disparaître sous la fraîche lourdeur de l’écume et de goûter encore au bouillonnement régulier de la cascade qui court sous le soleil.

Angèle Paoli
D.R. Texte angèlepaoli



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