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Critique Ciné : The Outrun (2024)

Publié le 06 novembre 2024 par Delromainzika @cabreakingnews
Critique Ciné Outrun (2024)

The Outrun // De Nora Fingscheidt. Avec Saoirse Ronan, Paapa Essieu et Stephen Dillane.

The Outrun, adaptation du roman autobiographique d'Amy Liptrot, se démarque comme un film d'une intensité rare, où l'authenticité du vécu se mêle à une exploration poétique de la résilience. Dans ce film, la protagoniste, Rona, incarne la descente dans les abîmes de l'alcoolisme tout en cherchant à surmonter un passé lourd de traumatismes. À travers ce récit, la réalisatrice Nora Fingscheidt nous emmène dans les paysages sauvages des Orcades, un cadre rude et isolé qui devient le miroir du cheminement intérieur de l'héroïne. Saoirse Ronan, qui incarne Rona, livre une performance magistrale qui porte le film à un niveau de sensibilité et d'engagement émotionnel rarement atteint. Saoirse Ronan, qui fait preuve d'un talent remarquable, s'approprie le rôle de Rona avec une intensité saisissante. En incarnant cette jeune femme aux prises avec ses propres démons, elle ne cherche pas à rendre le personnage aimable ou attachant.

Rona, bientôt la trentaine, brûle sa vie dans les excès et se perd dans les nuits londoniennes. Après l'échec de son couple et pour faire face à ses addictions, elle trouve refuge dans les Orcades, ces îles du nord de l'Écosse où elle a grandi. Au contact de sa famille et des habitants de l'archipel, les souvenirs d'enfance reviennent et se mêlent, jusqu'à s'y confondre, avec ceux de ses virées urbaines. C'est là, dans cette nature sauvage qui la traverse, qu'elle trouvera un nouveau souffle, fragile mais chaque jour plus puissant.

Ronan explore les nuances d'un caractère complexe, qui oscille entre auto-destruction et quête de renouveau. Elle incarne à la fois la vulnérabilité et la force intérieure, faisant de Rona un personnage auquel il est difficile de rester indifférent. Cette interprétation est d'autant plus marquante qu'elle laisse transparaître la douleur et l'angoisse de manière subtile, sans jamais tomber dans l'excès ou la caricature. Ronan incarne une femme brisée, dont chaque geste et regard évoquent la lutte contre l'addiction et la recherche d'un ancrage émotionnel. Le choix de la réalisatrice d'adopter une narration non-linéaire peut dérouter certains spectateurs. Les allers-retours entre le passé de Rona à Londres, où elle est engluée dans une spirale autodestructrice, et son présent dans les Orcades, où elle entreprend une difficile désintoxication, apportent une certaine densité au récit. Ce montage déstructuré reflète le chaos mental du personnage, même si le choix stylistique risque parfois d'alourdir la narration et de créer une confusion.

On peut se questionner sur la pertinence de cette approche, qui rend moins fluide l'évolution de Rona et peut donner l'impression de ralentir l'émotion brute du récit. Toutefois, cet aspect fragmenté symbolise également les ruptures dans la vie de l'héroïne, tout en renforçant le sentiment d'errance qui caractérise son parcours. Les paysages des Orcades jouent un rôle central dans The Outrun, devenant presque un personnage à part entière. Ces terres sauvages et isolées, balayées par des vents incessants, symbolisent à la fois la brutalité et la beauté de la quête de rédemption de Rona. Ce cadre austère et dépeuplé offre une dimension poétique au film, contrastant avec la frénésie de Londres. La solitude de l'île permet à Rona de se confronter à ses failles et de se reconnecter avec elle-même. Les images des falaises abruptes et des mers agitées donnent une ampleur visuelle qui souligne l'isolement et la difficulté de son cheminement intérieur.

Ce retour aux sources devient pour elle une manière de réapprendre à vivre et de se libérer des chaînes de son passé. The Outrun aborde l'alcoolisme sous un angle souvent négligé : celui d'une femme en proie à ses propres tourments. Cependant, l'approche adoptée par le scénario, qui tente de lier son addiction à des traumatismes passés, peut paraître parfois maladroite. La volonté d'expliquer l'alcoolisme de Rona par des événements tragiques de son passé soulève des interrogations quant à la profondeur du message véhiculé. Certains aspects du scénario semblent suggérer que les blessures d'enfance et les traumatismes sont la cause principale de son addiction, une perspective qui, bien qu'elle puisse être pertinente, tend à réduire le personnage à une figure de victime. Ce choix narratif aurait peut-être gagné à être nuancé pour mieux respecter la complexité de l'addiction, un sujet qui mériterait une exploration plus indépendante des seules causes extérieures.

Si The Outrun bénéficie de la puissance visuelle et émotionnelle de la performance de Ronan, ainsi que de la mise en scène saisissante de Fingscheidt, le récit en lui-même laisse un léger goût de déjà-vu. Les histoires de rédemption après une plongée dans l'alcoolisme ont été abordées de nombreuses fois au cinéma, et il est difficile pour The Outrun de se démarquer totalement dans ce genre. Malgré cela, la profondeur et l'authenticité apportées par l'adaptation du livre d'Amy Liptrot confèrent une dimension personnelle et intime à l'histoire, permettant au film de toucher un public en quête d'histoires vraies et d'émotions brutes. The Outrun n'est peut-être pas une révolution dans le domaine des récits sur la dépendance et la résilience, mais il parvient à capturer l'essence d'une lutte personnelle et introspective grâce à une mise en scène soignée et une actrice principale au sommet de son art.

Ce film, porté par les performances sincères et l'atmosphère à la fois brute et contemplative des Orcades, invite à réfléchir sur le parcours de reconstruction et les défis de la sobriété. En dépit de quelques faiblesses narratives, il reste un témoignage poignant de l'impact des addictions et de la puissance du retour aux sources.

Note : 6.5/10. En bref, une plongée émotive dans la rédemption et la douleur d'une jeune femme en quête de renouveau. Bien que le sujet soit éculé, l'actrice principale et les paysages permettent d'élever le film.

Sorti le 2 octobre 2024 au cinéma


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