Un écrivain de polars débarque au Japon pour faire la promotion de son dernier livre avec une idée derrière la tête : rencontrer son écrivain culte, son modèle : Shundei Oe, auteur à succès que personne n'a jamais vu, pas même son éditeur. Pour cela, Alex Fayard compte sur la seule arme qu'il possède pour le provoquer : les ventes de son livre au Japon ont dépassé celles du dernier livre de Shundei Oe, il espère donc le faire sortir de l'ombre.
Aussitôt arrivé à Kyoto, la ville où habite Shundei Oe, Alex Fayard est pris en main par son éditeur avec qui il se lie d'amitié. Les messages de menace de Shundei Oe, entre rêve et réalité, ne tardent pas à arriver, comme ce coup de fil sur le plateau d'une émission de télé japonaise ou ces cauchemars récurrents, la teneur est toujours la même : qu'il rentre à Paris!
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A l'occasion d'une invitation dans une maison de thé, Alex est subjugué par la danse de Tamao, une geisha (geiko, c'est à dire geisha de Kyoto), bien qu'on ne ressente absolument pas la facination que veut montrer le réalisateur, on se demande bien pourquoi soudain cet air tétanisé de Magimel dans la maison de thé... Les dés sont jetés, l'écrivain va revoir rapidement la geisha qui lui demande de l'aide, sous prétexte qu'il est devenu le spécialiste mondial des écrits de Shundei Oe sur lequel il écrit une thèse. Tamao lui raconte alors son passé : orpheline, ayant été recueillie à l'âge de onze ans dans une maison de geishas où elle a été formée au métier, elle a finalement épousé un jeune homme aperçu dans la rue qu'elle a quitté peu après. Aujourd'hui, son éphémère ex-mari, qu'elle n'a plus revu depuis quinze ans mais qu'elle soupçonne d'avoir quelque chose à voir avec Shundei Oe, vient de se manifester par une lettre de menaces en apprenant, elle ignore comment, que Tamao est à présent enceinte d'un de ses clients, un homme puissant et cruel.
Benoît Magimel
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Démarrant brillamment par un film dans le film, japonisant en diable, adapté d'un roman de Shundei Oe, que l'écrivain français montre dans une fac à des étudiants, le récit reprend mollement après le générique : après la projection du film japonais, Benoit Magimel/Alex Fayard, fait à l'assistance dans l'amphi, depuis son estrade, la démonstration des ingrédients du succès de Shundei Oe : sexe, violence et absence totale de morale. Immédiatement, on remarque avec douleur que Magimel, le meilleur comédien de sa génération, récite ici son texte, et, malheureusement, ça ne va pas s'améliorer beaucoup pendant deux heures (sauf les toutes dernières scènes où on le retrouve).
On se dit que des certaines scènes du films ont dû être supprimées pour que cette histoire piquante soit montrée comme un banal polar aseptisé et surexplicatif ne voulant choquer ni déranger personne. Si l'ambiance japonaise, côté décor, est bien reproduite, si la mise en scène d'un grand pro est irréprochable, les relations entre les personnages sont plates, l'action atone, la passion absente, et les pratiques sexuelles SM chères à Barbet Scroeder tellement édulcorées qu'on se demande bien pourquoi il est allé chercher ce scénario pour le dévitaliser à ce point. De l'ombre, on a les personnages figés qui y demeurent, de la bête dans l'ombre, une vague esquisse, une idée que le spectateur développera de son côté en sortant de la salle, sans doute...
Lika Minamoto
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Barbet Schroeder, documentariste dans l'âme, outre ses films documentaires purs comme "Idi Amin Dada" (lire la récente critique du film sur le Blog du Dr Orlof...) ou récemment "L'Avocat de la terreur", était connu dans les années 70 pour injecter, greffer, dans ses films de fiction, des passages entiers documentaires (les impressionnantes scènes de transe dans "La Vallée", par exemple, sont des cérémonies réelles avec des acteurs mêlés aux autochtones), voir engager des professionnels (pratiquants SM vrais acteurs et conseillers sur "Maîtresse"). Dans tous les cas, ces films donnaient une imparable impression de "faire vrai" comme le célèbre "More" qui l'a lancé. Que s'est-il donc passé depuis le long intermède américain de Schroeder avec, au début, des films en demi-teinte plutôt réussis, inspirés de biographies et de faits réels ("Barfly" sur Bukowski, "Le Mystère Von Bulow" sur l'affaire Von Bulow), et ensuite, des films plus nettement commerciaux ("JF partagerait appartement") pour revenir ici avec cet hybride dont on devine que la vocation n'était pas seulement de concocter un thriller consensuel tous publics avec une touche d'exotisme? Grande déception...
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