Les merveilles (Grande Meraviglia)
Auteur : Viola Ardone
Traduit de l’italien par Laura Brignon
Éditions : Albin Michel (21 Août 2024)
ISBN : 9782226491428
404 pages
Quatrième de couverture
Elba porte le nom d'un fleuve : c'est sa mère qui l'a choisi. Seuls les fleuves circulent librement, lui disait-elle, avant de disparaître mystérieusement. Depuis, Elba grandit seule dans cet endroit qu'elle nomme le monde-à-moitié : un asile psychiatrique, à Naples. C'est là qu'elle pose son regard d'enfant, sur le quotidien de cette « maison des fêlés, avec dedans plein de gens qui ressemblent à des félins », nourrissant de ses observations son Journal des maladies du mental. Jusqu'au jour où le jeune docteur Fausto Meraviglia décide de libérer les patients, comme le prévoit une loi votée quelques années plus tôt en 1978, et de prendre Elba sous son aile. Lui qui n'a jamais été un bon père apprend le poids et la force de la paternité.
Mon avis
Ce récit commence en 1982, on fait connaissance avec Elba, quinze ans, née à l’asile où sa mère a été internée car elle avait fauté. Internement abusif bien sûr. Elba a grandi avec elle dans ce lieu puis est allée à l’école des bonnes sœurs avant de revenir (en se faisant passer pour malade mentale) afin de retrouver sa mère. C’est elle qui s’exprime dans la première partie de ce roman. Le phrasé est brut avec des phrases courtes, qui choquent, qui percutent. C’est même un peu « cru ». Elle décrit le monde des fêlés, le monde à moitié avec les calmes et les agités. Certains ne devraient pas être là, les soins ne sont pas forcément adaptés. On « soigne » à coups de cachets, de sangles, d’électro chocs, parfois …. Écouter les malades ? Non, pas besoin …
Cette première partie n’est pas simple à lire, parce qu’elle renvoie des images de traitements injustes et violents pour les personnes hospitalisés. C’est révoltant car souvent les médecins ne vérifient pas le diagnostic énoncé. On peut se retrouver à l’asile parce qu’on dérange en n’étant pas d’accord avec sa famille….brrrr…. Malgré tout, j’ai eu le sentiment d’une présentation assez édulcoré du lieu et de ses habitants. Comme si l’auteur tenait à les rendre tous attachants.
Deuxième partie, 2019, c’est Fausto Meraviglia, maintenant âgé qui partage ses pensées. Il était « le jeunot », le médecin qui a débarqué à l’asile et qui, tenant compte de la loi 180 (de 1978) a voulu changer les méthodes en offrant aux patients « une ouverture sur l’extérieur ». Il raconte ses combats, ses déceptions, les difficultés rencontrées … Et on découvre cinquante ans après ce qu’il pense de tout ça.
Nous continuons cette lecture avec les années 1988 et 1989 et une dernière partie sur la journée du 31 décembre 2019.
J’ai été emballée lorsque j’ai lu « Le choix » de Viola Ardone et j’attendais beaucoup de ce nouveau titre. Je suis plus mitigée. Peut-être que j’attendais trop ou que le thème général de la folie n’était pas pour moi. Mais je ne regrette en rien ma lecture. La relation que la mère d’Elba tisse avec sa fille est merveilleuse, délicate et vaut à elle seule le détour.
L’écriture de l’auteur (merci à la traductrice) est poétique, pleine d’humanité. La lire c’est un plaisir. Elle ose aborder des sujets qui n’ont rien d’évident. Elle bouscule le lecteur, elle nous oblige à aller plus loin, à nous questionner sur tout ce qu’elle évoque.