Tennis féminin: la valse des n°1

Depuis les regnes de Seles, Graff et dans une moindre mesure d'Hingis, la couronne de la WTA valse de tete en tete sans qu'elle semble devoir se fixer durablement. L'actuelle n1, Anna Ivanovic, vient de battre un record dans un tournoi du Grand Chelem : se faire battre par la 188eme mondiale - ce qui devrait lui couter sa place de leader.

Reprenons a la fin du regne d'Hingis en 2001. C'est logiquement la n2, la tres peu charismatique Davenport, qui boucle l'annee en tete, avec Capriati en n2 et la cadette des Williams en n3. L'emergence des deux soeurs cogneuses laisse augurer d'une passation prochaine des pouvoirs. La suprematie des soeurettes semble s'installer durablementquand elles monoploisent les deux premieres places fin 2002 devant Capriati. Les USA font le triple.

Fin 2003 la hierarchie est bousculee et c'est la Belgique qui reprend la couronne: Henin la wallonne devance Clijsters la flamande; Serena Williams a recule a la troisieme place. La nouvelle generation a pris les commande.

Fin 2004 patatras, plus de Belges, plus de Williams. Davenport est de retour aux affaires, avec enfin Mauresmo toute proche du but et la surprenante Myskina victorieuse a Roland-Garros. Davenport assure suffisamment pour se succeder a elle-meme en 2005, tandis que Clijsters est de retour et que Mauresmo se maintient.

Une Belge chasse l'autre en 2006: Henin domine outrageusement, suivie de Sharapova et de Mauresmo. Les Russes sont partout. La domaination d'Henin semble partie pour longtemps; en tout cas elle se poursuit en 2007, tandis que derriere les changements continuent: Kustensova accede enfin a la 2eme place et Jankovic progresse regulierement.

2008 commence avec le retrait de Justine Henin et l'avenement d'Ivanovic, regne qui s'annonce de courte duree apres les deux defaites prematurees a Wimbledon et Flushing Meadow.

Et encore, il conviendrait de mentionner les ephemeres premieres mondiales, comme Mauresmo, Clijsters ou Sharapova. Bref, elles sont plus d'une dizaine a avoir ces dernieres annees occupe l'une des 3 premieres places mondiales. Comme expliquer cette valse permanente, alors qu'on observe une grande stabilite chez les hommes?

Il y a d'abord le bon niveau general, lie a l'absence de LA championne au-dessus du lot. Il y a surtout les blessures qui ecartent a tour de role l'une ou l'autre des leaders. Meme quand ces blessures sont legeres, on a l'impression que la reprise est plus longue que chez les hommes. Probablement que l'aspect psychologique est decisif: la blessure issue d'une saturation physique va de pair avec une saturation psychique. Mauresmo en est une excellente illustration. Justine Henin a arrete sa carriere en grande partie pour cette raison. Mais peu ou prou toutes y sont passees. Dans quelques cas, les occupations para-tennistiques parasitent les performances. Depuis Kounikova, le tennis feminin est devenu glamour. Laquelle n'a pas pose dans des flous artistiques pour des magazines ? Meme Seles ou Mary Pierce, qui ne sont pas exactement des top-models, ont sacrifie a cette mode. En tout cas, pour les soeurs Williams, le tennis est conu comme une occupation intermittente, qui explique le yoyo dans le classement depuis 2000: elle ne pensent qu'a la mode et au cinema. Quand on a le physique de Sharapova ou le minois d'Ivanovic, les sollicitations extra-sportives sont permanentes et il est bien difficile de s'astreindre a des heures d'entrainement sous la chaleur.

Bien fort qui peu predire qui sera n1 a la fin de la saison, et pour combien de temps. Le classement est infiniment plus serre que chez les hommes et il suffit de deux victoires successives pour se retrouver en tete. Si Jankovic va au bout de l'US Open, elle devrait a son tour avoir droit a la consecration. En tout cas, la future nouvelle n1 appartiendra encore au cercle des "anciennes"; les petites nouvelles, comme A. Cornet, sont encore trop loin pour briguer la place et les types de jeu sont trop proches pour que l'une se detache vraiment.