Le rôle du bassiste a toujours été un peu délicat dans le monde du rock and roll. Alors que beaucoup ont rétrogradé la plupart des bassistes au rang de “guitaristes moins talentueux”, tous, de James Jamerson à John Entwistle, ont prouvé ce qui pouvait arriver si l’on traitait le bas du spectre comme une guitare principale et si l’on servait la chanson de la bonne manière. Alors que Paul McCartney s’est transformé en un bassiste magistral au sein des Beatles, George Harrison pensait qu’il ne pouvait pas se comparer à ce que Willy Weeks pouvait faire.
D’ailleurs, il y a fort à parier que Harrison aurait été heureux de jouer avec n’importe qui d’autre que McCartney une fois le groupe dissous. Au début des années 1970, la rupture entre John Lennon et McCartney est telle que “The Quiet Beatle” est piqué au vif par les manigances de McCartney, de plus en plus irrité d’être traité comme le petit frère du groupe.
Une fois qu’il a goûté à la vie en tant qu’artiste solo, Harrison s’est montré encore meilleur que ses anciens compagnons à certains égards. Tout au long de All Things Must Pass, chacune de ses chansons présente une nouvelle approche de sa musique que personne n’avait entendue auparavant, de la lourdeur de Let It Down à la country totale de Behind That Locked Door.
Alors comment un bassiste plein d’âme comme Weeks peut-il jouer un rôle dans tout cela ? Eh bien, malgré tous les genres avec lesquels Harrison a joué, il avait un don pour écrire du R&B vers le milieu des années 1970. Bien qu’Extra Texture n’ait pas reçu un accueil des plus chaleureux, de nombreux morceaux l’amènent à jouer de ses talents de chanteur avec des musiciens de studio comme Weeks.
Compte tenu de son expérience avec des légendes comme Donny Hathaway, Weeks était le musicien de studio idéal pour travailler avec Harrison, sachant toujours comment servir la chanson et maintenir le rythme sur tous les morceaux auxquels il participait. Il suffit d’écouter son interprétation de Love Comes to Everyone sur l’album éponyme de 1979 pour se rendre compte qu’il ne comprend pas seulement la pochette, mais aussi comment réagir lorsque quelqu’un d’autre joue quelque chose d’intéressant.
Malgré une communication symbiotique avec ses compagnons, Harrison se souvient avoir été stupéfait par ce que Weeks pouvait faire, déclarant : « Même à l’époque, pour jouer avec les Beatles, je préférerais avoir Willy Weeks à la basse plutôt que Paul McCartney. C’est la vérité, avec tout le respect que je dois à Paul, les Beatles, c’était comme être dans une boîte, il a fallu des années après avoir quitté les Beatles pour arriver à jouer avec d’autres musiciens parce qu’on était tellement isolés ensemble. »
En fait, la raison pour laquelle Weeks a le mieux travaillé avec Harrison est qu’ils connaissent tous deux parfaitement les rouages de leurs instruments. Dans le solo de l’interprétation en direct de Everything is Everything par Hathaway, Weeks n’abuse jamais de sa présence et tire le meilleur parti du strict minimum, tout comme Harrison l’avait fait sur les premiers albums des Fab Four.
Malgré toutes les œuvres emblématiques sur lesquelles il a joué, Weeks est l’exemple même d’un génie silencieux qui se cache dans l’arrière-plan de l’histoire des années 1970. D’ailleurs, ce sont toujours les plus discrets qui finissent par être les plus intéressants lorsqu’on lève le rideau.