Magazine Bd

A moindres risques, immersion en salle de conso, la chronique consommée

Par Juju-Gribouille @JujuGribouille

Série : -
Titre : A moindres risques, immersion en salle de conso
Auteurs : Mat Let (scénario et dessins), Fachri Maulana (couleurs)
Éditeur : La Boîte à Bulles
Collection : -
Année : 2024
Pages : 192

Résumé d'une histoire réelle :

Mat est dessinateur. Il est chargé d'une mission : rendre compte par ses dessins de la vie d'un lieu particulier : la salle de consommation à moindre risque de Paris Lariboisière. Nous sommes en 2021 et Mat va découvrir un lieu ouvert pour que les personnes en grande précarité, victimes d'une addiction à la drogue, puissent s'injecter leur dose en diminuant les autres risques pour la santé liés à la consommation de stupéfiants. Contrôlés mais surtout encadrés, écoutés par toute une équipe associative, une multitude de personnes défilent dans la salle. Mat va apprendre à connaître autant les encadrants que les habitués des lieux...

Le scénario d'une Docu-BD riche et dense :

Mat Let a su nous rendre palpable la vie de ce lieu, avec ses règles, ses équipes, et surtout ses usagers. Il s'est intéressé aux deux partis, ceux qui étaient pour une salle de consommation et ceux qui étaient contre cette salle de shoot. Accolée à l'hôpital Lariboisière, cet espace permet aux usagers qui n'arrivent pas à se sortir de l'addiction de venir consommer leur dose de sken ou leur galette de krach.
Mat nous fait bien comprendre la fonction de ce lieu. Il ne s'agit pas de maintenir les gens dans la drogue, ni de les en faire sortir. L'idée est de lutter contre les injections sauvages en pleine rue, les déchets dangereux pour la santé des autres, seringues usagées, compresses ensanglantées...
Car l'injection de drogue ne provoque pas uniquement des problèmes d'addiction, elle implique plusieurs maladies annexes : HIV, hépatite... et aussi des risques d'agression.

La salle offre un havre de paix, sécurisé, où les usagers peuvent aussi rencontrer des bénévoles qui les aident dans leur démarche. Désocialisé, certains n'ont plus de numéro de sécu, d'autres parfois veulent s'inscrire à des cures de désintoxication. A la salle, ils trouvent aide, réconfort, sans jugement. Mais les règles sont strictement appliqués, l'inscription, le tri des déchets dangereux...
Pour nous faire comprendre l'utilité et l'importance de cette salle, Mat Let est aussi allé là où sont parqués les drogués, des jardins d'Eole au square Forceval dans Paris. Le contraste est flagrant. Les associations sont présentes aussi pour aider, mais il n'y a plus de contrôle, de suivi. Les gens sont entassés, ont monté des tentes et restent là en attendant de pouvoir trouver leur dose, les dealers sont tranquillement installés et vendent leurs produits. C'est grâce à ce contraste qu'on comprend l'utilité de la salle. Mat Let sait aussi en monter les limites, mais il parvient à nous faire saisir le problème dans toute sa complexité. Et surtout, nous comprenons l'importance des associations comme Gaïa et Médecins du monde sur ces sujets préoccupants, dernière main tendue vers des gens abandonnés à cause de leurs addictions.

Le dessin croqués sur le vif :

Mat Let a commencé par dessiner dans son carnet ce qu'il voyait. Puis c'est après coup que l'idée lui a été soufflée de faire une BD. Travail de longue haleine qui a porté ses fruits avec ce gros volume. Les noms et informations concernant les usagers ont été changés, bien sûr. Et le dessin vivant, dynamique nous permet de suivre toute cette galerie de personnages, alors que Mat, se dessinant lui-même, nous sert de fil conducteur.
Les couleurs à l'aquarelle - évitant les aplats homogènes - et le style semi-réaliste apportent une touche de douceur au dessin. Une douceur bien utile pour permettre d'encaisser le propos et les situations de vie parfois extrêmement dures à voir. Bien que regorgeant d'informations, le rythme de la BD va vite: Mat rencontre les bénévoles, les usagers, explore la salle, sa cour, les camps en extérieur de drogués, les bus mobiles, et nous nourrit de tout ce qu'il a vu.

Conclusion d'une BD importante :

Une BD qui permet de bien mieux comprendre le fonctionnement mais aussi les enjeux liés à ces salles de moindre risque, tout en nous donnant à voir des portraits humains pour ne pas oublier qu'au-delà des statistiques, il y a des hommes et des femmes.

Zéda croise Mat !


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Juju-Gribouille 1046 partages Voir son profil
Voir son blog

Magazines