J'en connais que la popularité
de Paris Hilton laisse pantois. Mais qu'a-t-elle fait ?
(disent-ils.) Hériter d'une fortune ? Mettre ses vidéos
de sexe sur le net ? Participer à des émissions de
téléréalité ? Qu'a-t-elle réalisé
pour devenir la personne la plus connue de la planète avec le
Christ, Bouddha et quelques autres ?
J'ai une réponse. Paris Hilton, elle aussi,
est un personnage liturgique. Peut-être pas une déesse,
mais une prêtresse. Nous sommes dans les bancs, elle sur
l'autel médiatique, c'est une sorte de messe et nous la
regardons dans sa fonction sacrée : consommer. Consommer
des objets, des produits de luxe, des services, des hôtels, de
la mode, des transports en hélicoptère et en jet privé,
des hommes...
C'est sa fonction rituelle. Elle est l'interface
entre le fidèle et le sacré. Entre le consommateur et
la Consommation.
Comme, jadis, le Roi dont parle Sartre dans Saint
Genet comédien et martyr : « Il mange avec une
générosité inlassable. » Et la foule
est admise à le regarder bâfrer.
Le Roi, Paris Hilton, tout du même. Ceux qui
détruisent devant nous les produits que nous créons, et
que nous admirons pour ça.
Appartenir à cette catégorie
privilégiée n'est pas à la portée de
n'importe qui. Il faut deux critères pour y être
admis. En tout cas si on en croit Sartre.
D'abord être né. Issu d'une
lignée qui a formé le goût de l'aliment ou du
luxe (les Bourbons, les Hilton).
Ensuite, avoir le droit divin de consommer.
C'est-à-dire être désigné. S'il est
évident que c'était par Dieu jadis, quand on se
trouvait dans une société théocratique, de nos
jours, en démocratie, ce sont les médias qui donnent
l'onction.
Cependant c'est en même temps aussi un peu
plus compliqué que ça. Paris Hilton n'est pas
seulement une prêtresse. Elle est aussi un produit sacré,
incarnant la Consommation, je l'ai dit, donc pourvue de Sa présence
réelle. Une hostie, consommée par ses admirateurs.
Et, donc, bientôt absorbée, détruite.
Mais il y en aura d'autres après... Elles
attendent déjà.
(Publié aussi dans Blogres .)