L'histoire: À Toronto, Mara, professeure d'écriture créative à l'université (Deragh Campbell) retrouve par hasard Matt (Matt Johnson), un camarade de classe qu'elle avait connu il y a dix ans et qui est devenu écrivain. Mariée à un musicien (Mounir Al Shami) et mère d'une fillette de deux ans, Mara doit bientôt aller donner une lecture à New-York. Or son mari étant pris par une répétition, c'est Matt qui se propose de la conduire.
Passage au FNC: les 14 et 16 octobre 2024 - Sortie en salle au Québec indéterminée.
Mon avis
Avec Matt and Mara, l'Ontarien Kazik Radwanski livre un drame sentimental contemporain franc et simple qui doit beaucoup à ses dialogues naturels et à la crédibilité de ses comédiens. D'un côté l'évanescente et mystérieuse Mara, une femme mariée qui semble troublée à l'idée que le couple qu'elle forme avec le père de sa fillette ne soit pas aussi solide qu'elle le croyait. Lorsqu'elle revoit l'homme dont elle a peut-être été amoureuse dans le passé, une fracture s'ouvre.
Celui qui ébranle les certitudes de la professeure trentenaire n'est autre que Matt, un romancier libre de toutes contraintes, ou du moins c'est l'image qu'il véhicule. Nonchalant, un tantinet arrogant, celui-ci voit en son ancienne amie la renaissance d'un amour inachevé. Juché sur une forme subtile, pas trop appuyée, de machisme ordinaire, il use de son charme et son bagou pour la séduire, jusqu'à ce qu'elle prenne conscience du filet dans lequel elle est en train de tomber.
Réalisé sans chichis, avec une évidente économie de moyens, Matt and Mara se développe sur l'attirance de l'un et le désir refoulé de l'autre. Pour autant, Radwanski préfère rester en surface, à l'orée du dilemme intérieur de sa protagoniste. Délaissant les grandes discussions, mettant de côté le pathos, il puise sa source dans l'humilité des univers d'Éric Rohmer, comme le suggère ouvertement le dernier plan fixe du film. Il opte donc pour les petits détails du quotidien, suggérés plus que décrits. Ce faisant, il confirme son talent pour construire des histoires antidémonstratives, tout en délicatesse, comme on avait pu le voir dans So Much Tenderness en 2019.
La description des rapports humains et des tressaillements du cœur est précise ; la description du personnage féminin fragile, mais pas victime, est assez juste. Du reste, l'auteur peut compter sur la forte présence de le comédienne Deragh Campbell, qu'il avait déjà très bien dirigée dans Anne at 13,000 ft, son précédent film présenté dans plusieurs festivals il y a deux ans.
Depuis How Heavy This Hammer (FNC, 2015), pas mal de chemin a été parcouru par le cinéaste, qui, comme le dit Wendy Ide du Screen Daily, devrait sans peine " créer un buzz discret sur le circuit des festivals ". De fait, Matt and Mara ne révolutionne rien, mais offre une histoire suffisamment solide et bien jouée pour être attachante et intéressante. Et ce, même si la partition déployée est assez familière.