Certains naissent grands, d’autres atteignent la grandeur, et d’autres encore se font enseigner la grandeur par une autre icône musicale des années 1960. C’est le cas de George Harrison. Il est indéniable que le guitariste a été génial dès le début, colorant les chansons des Beatles de son flair imaginatif. Mais lorsqu’il s’est agi de créer son opus magnum, son excellence a été stimulée par un professeur indispensable.
En tant que plus grand groupe du monde, les Beatles avaient des pairs puissants. Ils se sont hissés au sommet aux côtés de certaines des figures les plus emblématiques de l’histoire de la musique, côtoyant des stars du rock, des acteurs, des mannequins, des chefs religieux et même des dirigeants du monde entier. En réalité, les Fab Four avaient accès à pratiquement tous ceux qu’ils voulaient. Avec un tel niveau de célébrité, personne n’était à moins d’un coup de fil. S’ils recherchaient le soutien de n’importe quel musicien sur la planète, ils pouvaient probablement simplement tendre la main et faire en sorte que cela se produise.
Mais le groupe n’a jamais semblé fonctionner de la sorte. Le monde des Beatles était très fermé, né uniquement de leur propre inspiration, de leur dynamique de groupe et d’un petit groupe de collaborateurs qui étaient au courant de leur processus. Il y avait George Martin, le soi-disant cinquième Beatle. Il y avait aussi Billy Preston, qui a eu un impact considérable sur leurs œuvres ultérieures. Il y a même Eric Clapton, dont le jeu et l’obsession pour sa femme ont poussé George Harrison vers des sons plus grands et plus hymniques.
Pour un morceau ultérieur, cependant, il y avait une autre voix dans le mélange. En 1968, les Fab Four se rendent en Inde pour étudier la méditation. Ils sont accompagnés d’autres noms comme Mia Farrow et sa sœur Prudence, Jane Asher, la petite amie de McCartney, et la star du folk Donovan.
L’amour des Beatles pour Donovan est tout à fait logique. Le chanteur écossais a fait irruption sur la même scène folk contre-culturelle que Bob Dylan, que le groupe a d’ailleurs qualifié d'”idole”. Ils étaient clairement intéressés par ce son folk plus poétique et par la façon dont les paroles de Dylan et de Donovan oscillaient entre l’imagerie, le symbolisme et les déclarations directes du monde réel, réussissant à les rendre tout aussi émouvantes que n’importe quelle métaphore.
Harrison est inspiré par le jeu de guitare de Donovan. Au fur et à mesure qu’il apprend à connaître l’artiste, le monde du folk s’ouvre à lui, révélant un son différent du rock and roll classique auquel il était habitué. Un soir, Donovan lui apprend un motif d’accord descendant qui deviendra celui utilisé sur “Something”, le morceau considéré comme le meilleur de Harrison.
“Je suis devenu le mentor de George pour l’écriture des chansons”, a déclaré Donovan lors d’une interview en 2024. Au fur et à mesure que les deux musiciens se rapprochaient, l’artiste écossais s’est rendu compte de l’impact qu’il avait sur le discret Beatle, l’aidant à s’extérioriser. Il se souvient : “Il était dans l’ombre de John et de Paul depuis tant d’années, et je lui ai dit : ‘Écoute, je vais te montrer quelques trucs, comment encourager les chansons’.”
“Il y a un moyen d’encourager la chanson à venir. Vous pouvez la taquiner, comme la pêche. Je lui ai dit comment jouer un accord, puis j’ai posé mon oreille sur la guitare, j’ai écouté l’accord ouvert et j’ai essayé un tempo. Vous pouvez entendre des mélodies, croyez-le ou non. Les mélodies apparaissent, mais il faut être rapide pour les attraper”, a-t-il ajouté.
Les enseignements de Donovan ont manifestement porté leurs fruits. À partir de 1968, l’empreinte de Harrison sur le groupe se fait de plus en plus forte. Des titres comme “While My Guitar Gently Weeps”, “Here Comes The Sun” et “Something” sont devenus quelques-unes des œuvres les plus marquantes du groupe, le guitariste refusant de perdre la tête. Grâce à l’enseignement et aux encouragements de Donovan, Harrison a atteint sa grandeur.