Un record du monde d'éducation financière ?

Publié le 20 octobre 2024 par Patriceb @cestpasmonidee
Capital One est fière d'annoncer avoir atteint un record du monde de participation à un cours en ligne d'éducation financière, en l'occurrence celui qu'elle a développé et déployé en 2023 avec le spécialiste Khan Academy. Pendant un instant, j'ai cru que je devrai réviser mes préjugés sur les méthodes d'éducation… mais non.
L'événement était organisé le mois dernier par la banque, qui, sur une durée de 24 heures, a donc enrôlé et accueilli plus de 1 800 participants, pour la plupart des collégiens et étudiants, aux côtés de quelques-uns de ses propres collaborateurs, au sein de ses implantations sur l'ensemble du territoire américain ou à distance. L'objectif de ce défi hors norme consistait à mettre en lumière l'importance de l'acquisition de notions élémentaires pour une bonne gestion de l'argent, thème cher à Capital One.
Le record s'inscrit dans ce que l'institution considère être un succès général pour le cursus qu'elle parraine, avec environ 940 000 de personnes l'ayant suivi en 2023, pour un cumul de 27,5 millions de minutes d'apprentissage enregistrées. Et l'impact sur la vie quotidienne de ce presque million d'individus serait bien réel puisque, selon la Khan Academy, celles et ceux qui bénéficient du programme accroitraient leur épargne de 22% (sans plus de détails, entre autres sur des critères de persévérance).

Les chiffres bruts peuvent paraître flatteurs… mais ils méritent d'être relativisés. Tout d'abord, concernant le record, inscrit au Guinness, il tend à pâlir en comparaison d'autres rassemblements… tels que ces 4 700 danseurs traditionnels péruviens 🤣. Quant à l'assiduité, la moyenne de moins d'une demie-heure accordée par chaque « élève » en 2023 correspond au suivi complet et sérieux d'à peine un demi module sur la douzaine que comporte l'ensemble du cours. Soit le temps de découvrir les bases minimales de la mise en place d'un budget et de la division (au sens de l'arithmétique) pour l'organisation de son épargne (je n'invente rien, j'ai essayé !).
Ces éléments factuels confirment donc hélas mes craintes. Les jeunes générations, principalement visées par ces initiatives, ne sont guère réceptives à des méthodes d'enseignement traditionnelles, même quand leurs représentants affirment avec véhémence leur besoin d'éducation financière afin d'affronter leur future vie d'adulte et ses sources d'angoisse (comment financer ses études, comment acheter une voiture, comment se prémunir contre les petits et grands imprévus qui pourraient survenir…).
La déception est d'autant plus grande lorsque la démarche émane d'une banque, apparement sincère dans ses intentions et qui, en tous cas, y consacre quelques ressources. En effet, elle se trouve dans une position idéale pour proposer une approche pédagogique infiniment plus percutante que cette programmation qui ressemble à ce qu'offrirait le système scolaire : par exemple une mise en contexte des apprentissages, par bribes, à l'occasion des opérations réalisées sur un compte bancaire personnel.