Philippe Besson a choisi de situer l’intrigue de son dernier roman à Los Angeles. Après son roman sur l’affaire Villemin qui lui a valu bien des écueils (L’Enfant d’octobre), ainsi qu’un livre épistolaire au parfum de spleen (Se résoudre aux adieux), il revient avec Un homme accidentel, un roman très « ressenti », l’histoire d’une passion ardente, sauvage et secrète.
Le narrateur de ce roman est un flic trentenaire affecté dans les beaux quartiers de Beverly Hills, marié à une jeune femme qui porte son enfant et avec qui il vit un bonheur grandissant.Né à Bodega Bay (mais si, la ville des Oiseaux d’Hitchcock !), il a vécu modestement auprès de sa mère une enfance sans histoire et, plus tard, s’est installé avec Laura à Los Angeles, devenant « juste un flic qui faisait correctement son boulot ».
« L’accident » survient lorsque le cadavre d’un jeune prostitué est retrouvé dans un parc. Dans la poche du macchabée, un carnet. Griffonné sur une des pages, le nom de Jack Bell, acteur très en vue à Hollywood. L’enquête commence, et le narrateur est amené à interroger l’acteur à deux reprises. Au terme de leur second entretien, Jack Bell demande s’ils pourront se revoir. Quelques semaines plus tard, comme frappés par une urgence, ils se retrouvent comme un couple qui se serait quitté depuis des années, comme happés par une urgence presque violente, celle de la passion. Une passion qui croît au fil de leurs rendez-vous.
Heureux mais cachés, ils subissent les assauts de leur relation confidentielle, accidentelle… Le narrateur reste attaché à Laura, mais il sait qu’elle a subodoré quelque chose, que l’intuition de celle qu’il délaisse brisera tôt ou tard son secret. Jack, quant à lui, a derrière lui un lourd passé. Drogue et décente aux enfers ont marqué de façon indélébile ce jeune homme fragile. Leur amour, s’il est chaque jour plus fort, est constamment menacé. Ils savoureront ce danger, cet interdit, jusqu’à ce que l’enquête les rattrape, l’un rappelé par son devoir, et l’autre par son implication plutôt floue dans l’affaire.
Philippe Besson n’a rien perdu de son style sémillant. Et, même dans sa fougue, il parvient à livrer une profonde introspection d’un homme ayant totalement perdu ses repères dans les bras d’un autre, faisant voler sa vie en éclats. Il lui eût été impossible de résister à cette véhémente attirance.
On émettra quelques réserves quant aux troublantes similitudes avec le roman d’une certaine Annie Proulx… Et, malgré l’étiquette polar que d’aucuns ont collé sur ce roman à tort, Un homme accidentel n’a rien d’un roman noir, puisque la prémisse d’intrigue policière est vite étouffée par le récit de cette histoire d’amour, sous le « ciel si sexy de Californie »…