Quand il veut montrer sa surprise, il dit, en levant
un sourcil : « Ah ouais ! Quand même ! »
Une expression qu'il a prise chez un animateur télé.
Avec ses cheveux longs ramenés en queue de
cheval, une barbe rare, il a l'air d'un contestataire ou d'un
altermondialiste mais il veut devenir célèbre. Pas à
cause de quelque chose qu'il ferait, reconnaît-il, mais pour
ce qu'il est. Parce qu'il lui semble qu'il mérite la
célébrité.
Pendant qu'il m'explique ça, deux vieilles
dames montent dans le tram, emmitouflées dans des châles
et avec des chapeaux fantaisie très étranges. L'un
avec des sortes d'étages comme un gâteau. L'autre en
forme d'obus blanc. Deux excentriques. Celle du gâteau moins
âgée que l'autre. Une fille et sa mère,
peut-être. Il y a un air de famille.
Je me demande si elles suivent la mode. A voir le
col, les manches et le bas d'un de leurs manteaux orné de
renard blanc, on peut penser que oui.
Elles regardent avec approbation la voiture de police
qui nous dépasse, feu clignotant.
Derrière elles, un type au crâne rasé,
l'air mauvais, écoute de la musique très fort sur son
Ipod. Le rythme est familier, mais les sons couverts par les bruits
de la rue. Il s'approche, poussé par une grande Africaine en
boubou qui monte à l'arrêt Villeureuse. Je reconnais
le morceau. Dites-moi où ne en quel pays, Est Flora. la belle
Romaine. Du Villon et du Brassens... Ah ouais. Quand même.