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Bienvenue chez les Ch'tis, requiem pour une France défunte

Publié le 28 août 2008 par Edgar @edgarpoe
Profitant d'une programmation permettant un rattrapage, j'ai donc pu voir en juillet Bienvenue chez les Ch'tis.
Point de vue cinéma, c'est moins bon que la Grande vadrouille, dans le genre, mais c'est visible (j'aurai du mal à oublier la scène avec Galabru).

Ce qui est étonnant c'est que ce film moyen ait fait un tel score, deuxième film le plus vu en France.

Remarquons d'abord que le premier film est le Titanic. A croire que les films catastrophe attirent les foules.

Quel navire coule donc dans Bienvenue chez les Ch'tis ?

C'est la France qu'on a aimé et qu'on risque de voir disparaître, celle de l'unité nationale et des services publics.

Le film joue sur des ressorts profonds de la vie sociale française, dont font partie les grands services publics. On peut en effet faire valoir que les quatre héros du film sont, dans l'ordre, la Poste, la SNCF, la gendarmerie et les autoroutes. Or, ces services sont en voie d'extinction. Avec la privatisation des autoroutes qui est achevée, celle, rampante de la Poste, celle de la SNCF qui suivra - pour la gendarmerie, ce sera plus long -, ils n'ont plus de service public que le nom.

Dans les Visiteurs, c'était la continuité historique du pays qui était en scène, de façon positive. Avec Bienvenue chez les Ch'tis, c'est un adieu à la continuité territoriale que l'on reçoit.

Comme en Belgique, et grâce à l'Europe, tout le monde sent bien que bientôt ce sera chacun pour soi et chacun chez soi : les Ch'tis au nord et ceux qui ont l'assent au sud, les kenavo à l'ouest et  les adichats à Bordeaux...

Comme dans Titanic, il y a quelques survivants à la fin. Les gars du Nord resteront entre eux, et les marseillais de même. Le roman national est fini, il restera de sympathiques régions où l'on sera entre soi (entendu une émission délirante il y a quelques mois sur France Inter, où des auditeurs du Nord se querellaient à propos des lieux de tournage du film, qui ne respectaient pas la vérité identitaire de la région...) Demeurera aussi comme une nostalgie pour un pays uni.

Le film n'exprime consciemment rien de cette situation de fracture nationale, il est donc difficile d'en faire une oeuvre militante. Je l'ai vu pourtant comme un film profondément attaché à une unité dans la diversité, française, déjà complexe à faire vivre au quotidien, et que Bruxelles prétend régenter depuis un point unique. Une sorte de chant du cygne, parfaitement reçu par les spectateurs.



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