Je lis de très belles lignes de Pierre Magnard, l'un de mes maîtres, dans son livre Penser, c'est rendre grâce :
"L'Un nous veut et nous rend disponible, effaçant en nous toute empreinte, jusqu'à celle des idées, pour faire de nous des âmes sans intellect, comme si elles avaient fait retour à l'origine de la procession. Seul doit demeurer en l'âme ce par quoi elle est semblable à l'Un. A la trace de l'Un on échappe à toute dualité, celle du sujet et de l'objet, du connaissant et du connu, du spéculaire et du spéculatif. Plutôt que de connaissance, il faudrait parler de présence sans qu'aucun dualité n'intervienne, car alors l'Un se serait plus appréhendé comme tel, il ne serait plus seul, il ne serait plus l'Un. Seul le même se saisit du même, comme dans un amour fusionnel ou une communion."
Puis, il cite cette magnifique parole de Plotin :
"Cette similitude éprouvée dans la présence est décrite ainsi par Plotin :
'L'Un n'est absent de rien, et pourtant il est absent de tout, en sorte que présent, il n'est pas présent, sinon pour ceux qui peuvent le recevoir, et qui s'y sont préparés, de façon à ce qu'ils puissent venir coïncider en quelque sorte, être en contact avec lui, le toucher grâce à la ressemblance, c'est-à-dire grâce à la puissance que l'on a en soi et qui est parente avec lui parce qu'elle vient de lui. C'est seulement lorsqu'on est dans l'état où l'on était quand on est sorti de lui qu'on peut le voir de la manière dont il peut être objet de vision'".