Critique Ciné : Wildcat (2024)

Publié le 05 octobre 2024 par Delromainzika @cabreakingnews

Wildcat // De Ethan Hawke. Avec Maya Hawke, Laura Linney et Philip Ettinger.

Le film Wildcat, réalisé par Ethan Hawke, nous plonge dans la vie tourmentée de Flannery O'Connor, une écrivaine catholique du Sud des États-Unis, connue pour ses nouvelles singulières et provocatrices. Le film, bien que complexe et parfois déroutant, réussit à capter l'essence de cette auteure unique, tout en explorant des thèmes profonds tels que la religion, la classe sociale et les luttes personnelles d'une artiste face à sa propre condition. Au cœur de Wildcat, on trouve une performance intense de Maya Hawke, la fille d'Ethan Hawke et Uma Thurman, qui incarne avec brio Flannery O'Connor. Son interprétation est à la fois subtile et poignante, rendant justice à une femme marquée par la maladie et la solitude. Diagnostiquée avec le lupus, une maladie auto-immune qui l'a handicapée dans les dernières années de sa vie, O'Connor apparaît à l'écran comme une figure fragile mais déterminée, luttant pour continuer à écrire malgré son corps défaillant.

Le combat de la jeune romancière sudiste, Flannery O'Connor, afin de publier son premier roman.

Maya Hawke réussit à donner vie à ce personnage complexe, en oscillant entre les moments de vulnérabilité et ceux de force intérieure. Sa prestation se distingue par sa capacité à capturer la profondeur émotionnelle de son personnage, évitant ainsi les pièges d'une simple reconstitution biographique. Ce n'est pas un rôle facile, d'autant plus qu'il nécessite de s'approprier le dialecte et la culture du Sud profond des États-Unis, un défi que Hawke relève avec aplomb, même si certains spectateurs pourraient trouver son accent un peu difficile à suivre. Ce qui rend Wildcat particulièrement fascinant, c'est son mélange audacieux de réalité et de fiction. Tout au long du film, Ethan Hawke intègre des scènes issues des écrits de Flannery O'Connor, jouées par les mêmes acteurs qui participent aux scènes de sa vie réelle. Cette technique peut déstabiliser, car il devient parfois difficile de distinguer ce qui appartient à la vie d'O'Connor et ce qui relève de son imagination littéraire.

Pourtant, ce procédé offre une réflexion intéressante sur la manière dont ses expériences personnelles ont nourri son œuvre. Flannery O'Connor est connue pour ses récits étranges, souvent empreints de religiosité et de réflexions sur la condition humaine, notamment à travers le prisme de la foi et du péché. Le film explore ces thématiques avec une sensibilité palpable, en montrant comment la foi catholique d'O'Connor influence son écriture, mais aussi comment elle est perçue comme décalée, voire incompréhensible, par ceux qui l'entourent, notamment sa mère. L'ambiance générale du film est à la fois onirique et mélancolique. Les scènes lentes, entrecoupées de séquences fictives, contribuent à instaurer une atmosphère introspective et hypnotique. La musique, choisie avec soin, ainsi que la photographie travaillée, bien qu'alourdie par des filtres en post-production, ajoutent à cette impression d'irréalité.

Cependant, le film n'est pas sans défauts. La narration fragmentée, non linéaire, peut dérouter certains spectateurs. Les épisodes de la vie d'O'Connor sont exposés sans ordre chronologique, ce qui empêche parfois d'établir une véritable connexion émotionnelle avec son parcours. De plus, pour ceux qui ne sont pas familiers avec son œuvre, Wildcat peut sembler manquer de profondeur. Le film se contente souvent d'effleurer les conflits internes d'O'Connor sans vraiment plonger dans leurs causes ou conséquences plus profondes. Un autre aspect du film qui mérite d'être mentionné est son traitement des questions de religion et de classe sociale dans le Sud américain. Bien que Wildcat évoque ces thèmes, il ne parvient pas toujours à choisir une direction claire. À certains moments, il semble vouloir explorer les tensions raciales et sociales du Sud intellectuel, tandis qu'à d'autres, il se concentre sur la dimension spirituelle et religieuse de la vie d'O'Connor.

Cette hésitation nuit à la cohérence du film et peut laisser le spectateur avec une impression de confusion quant à ses intentions profondes. En fin de compte, Wildcat est un film qui séduira avant tout les amateurs de cinéma d'auteur et ceux qui s'intéressent à la vie de Flannery O'Connor. C'est un film exigeant, qui demande au spectateur de s'immerger dans une atmosphère plutôt que de suivre une intrigue claire et bien définie. Pour ceux qui cherchent un portrait fidèle et nuancé d'une artiste tourmentée, le film offre de beaux moments de réflexion et d'émotion. Cependant, pour les non-initiés, Wildcat risque de paraître lent et parfois difficile à suivre. Sa structure non linéaire et son utilisation d'un symbolisme parfois obscur peuvent frustrer ceux qui préfèrent des récits plus directs. Malgré cela, la performance de Maya Hawke et l'esthétique soignée du film en font une œuvre qui mérite d'être découverte, surtout par une journée pluvieuse où l'on cherche un film à savourer avec un esprit contemplatif.

Note : 5.5/10. En bref, une odyssée cinématographique sur Flanney O'Connor.

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