Critique du Petit Coiffeur, de Jean-Philippe Daguerre, vu le 19 septembre 2024 au Théâtre des Gémeaux Parisiens
Avec, en alternance, Félix Beauperin, Pierre Besnoit, Raphaëlle Cambray, Arnaud Dupont, Brigitte Faure, Romain Lagarde, Charlotte Matzneff, Sandra Parra, Thibaut Pinson, Julien Ratel et Thierry Sauzé, mis en scène par Jean-Philippe Daguerre
Un nouveau théâtre qui ouvre à Paris, c’est vraiment le feu. Et peut-être encore plus quand c’est le Théâtre des Gémeaux Parisiens, soit le petit frère du Théâtre sudiste du même nom dans lequel j’use mes fonds de culottes chaque années durant le festival OFF d’Avignon. J’a-dore ce lieu. Alors, j’étais carrément enthousiaste pour l’arrivée du petit nouveau. J’ai envie de tout voir. Et je me suis dit, pourquoi pas commencer par une valeur sûre, a.k.a un spectacle d’un auteur que je connais déjà un peu (et que j’aime beaucoup) et qui tourne depuis des années ? Le Petit Coiffeur, donc, c’est parti.
Il n’y a pas si longtemps, j’écrivais dans un autre article que j’en avais un peu ma claque, des nazis. Bon, là, pas de nazis en chair et en os, mais on est quand même en 1944, à Chartres, vous voyez l’ambiance. Mais je ne vais pas trop en dire. Car j’avais moi-même jeté un oeil au résumé et lu qu’une mère coiffeuse envoyait certaines clientes à son fils pour « une activité tout à fait particulière ». N’ayant pas du tout deviné l’activité tout à fait particulière et souhaitant vous laisser savourer l’effet de surprise, je m’arrête donc là. 1944. Libération de Chartres. Le reste appartient au spectacle.
Mince alors. C’est la pensée qui m’habite pendant tout le spectacle. Mince alors. Comment un spectacle qui tourne depuis tant d’années, qui me donne parfois l’impression d’avoir été vu par tout mon entourage, peut n’être « que » correct ? Je venais peut-être avec trop d’attente. Avec, encore une fois, comme dans tous les derniers Daguerre que j’ai vus, le souvenir du percutant Haffman en tête. Alors, c’est vrai, il a quelques excuses. C’est le spectacle qui ouvre la programmation de ce nouveau théâtre, le premier spectacle à jouer en ce premier jour d’ouverture, et malgré toutes ces premières fois, la salle est à moitié vide. Autant vous dire que ça ne doit pas aider les artistes. D’autant que le spectacle a déjà plusieurs années, il a (beaucoup) joué, il a (beaucoup) tourné, il a changé de distribution, tout cela peut nuire à l’énergie d’un spectacle. Double peine pour Le Petit Coiffeur, qui cumule les affres d’une première ET d’une reprise.
Mais la question que je me pose, c’est qu’aurait-elle été, l’énergie du spectacle, si on avait été dans un « bon » jour ? J’ai l’impression de faire à ce Petit Coiffeur les mêmes reproches que j’avais déjà faits à Du charbon dans les veines. L’écriture fonctionne, l’histoire se laisse suivre, les comédiens sont très bons, et pourtant. Et pourtant, on a beau avoir envie de connaître le dénouement, on n’est pas complètement dedans. C’est peut-être ces scènes courtes, un peu hachées, c’est peut-être ces bouts de décor pas clos, c’est peut-être ces bouts d’Histoire qui ne collent pas bien à l’histoire, c’est peut-être ces bouts de phrases trop pudiques pour dire vraiment les choses, c’est peut-être ce rythme auquel on n’est plus habitué. C’est peut-être toutes ces choses assemblées qui ont du mal à former un tout qui emporte. C’est peut-être que ça manque d’un liant. C’est peut-être pour ça que je suis passée un peu à côté.
Et ça ne m’empêchera pas de retourner aux Gémeaux trèèèèès bientôt.
© Fabienne Rappeneau