Quels sont les indicateurs verbaux et non verbaux du mensonge ?
Sommes-nous capables de déceler le mensonge chez notre interlocuteur ?
Quelle est la validité des techniques de détection du mensonge utilisées par les professionnels dans un contexte clinique ou légal ?
Quelles sont les signes nous trahissant quand nous mentons ?
La littérature portant sur cette question est aujourd’hui abondante. L’un des résultats les plus surprenants est le suivant. Les croyances communes concernant les indicateurs comportementaux du mensonge ne correspondent pas systématiquement à ses signes objectifs.
Par exemple, tout un chacun pense que le regard fuyant est un indicateur fiable du mensonge. Or, la recherche scientifique montre que ce n’est pas le cas ! Stéréotypes et connaissances erronés sur le mensonge sont à l’origine de notre faible aptitude à détecter avec succès la tromperie chez notre interlocuteur (Biland, 2004 ; Vrij, 2008).
Pouvoir déceler le mensonge est une capacité importante au cours de nos interactions quotidiennes. Elle l’est encore plus lorsqu’il s’agit de savoir si le suspect d’un crime ment ou dit la vérité.
Cependant, la vaste majorité des travaux portant sur les indicateurs du mensonge ont pour sujets d’expérience des individus non délinquants, principalement des étudiants d’université.
Pourtant, les criminels pourraient être des menteurs différents.
Par exemple, le psychologue suédois Pär Anders Granhag et ses collègues ont montré qu’ils ont des avis plus précis et moins stéréotypés sur les indicateurs du mensonge (Granhag, Andersson, Strömwall, & Hartwig, 2004).
En outre, ils sont capables de le déceler avec plus de facilité que des étudiants (Hartwig, Granhag, Strömwall, & Andersson, 2004).
Les criminels pourraient donc mieux connaître les stratégies fonctionnant et échouant pour tromper autrui.
Le psychologue Stephen Porter et ses collègues canadiens sont les premiers à comparer les comportements affichés par des délinquants criminels et des étudiants pendant qu’ils mentent ou disent la vérité à propos d’expériences personnelles émotionnelles (Porter, Doucette, Woodworth, Earle, & MacNeil, 2008).
Dans tous les cas, il leur était demandé d’en faire des récits crédibles. Les résultats obtenus, publiés dans la revue Legal and Criminological Psychology, font apparaître que, dans l’ensemble, ces deux groupes de participants se conduisent de manière équivalente quand ils mentent.
Les gestes illustrateurs de la parole sont plus fréquents et les récits sont moins détaillés pendant le mensonge (voir Encadré pour la présentation des comportements verbaux et non verbaux retenus).
Concernant les gestes illustrateurs, le résultat observé dénote avec l’affirmation généralement propagée dans la littérature, selon laquelle ces comportements sont exhibés moins fréquemment par les menteurs. La magnitude de l’effet est, toutefois, faible (DePaulo et al., 2003).
Par ailleurs, sur les 53 études répertoriées par le psychologue Aldert Vrij, le mensonge est accompagné par une diminution des gestes illustrateurs dans 14 d’entre elles, et dans 3, par une augmentation. Dans 36 de ces expériences, ces comportements ne sont pas associés au mensonge (Vrij, 2008, p. 95-99).
Deux différences sont notées entre les groupes de participants. Les autocontacts (self-manipulations) sont significativement plus fréquents chez les criminels faisant le récit d’un souvenir fabriqué. Ils sourient aussi moins en mentant qu’en se remémorant un souvenir réel, alors qu’aucune différence concernant ce comportement n’est constatée chez les étudiants.