Heroico (DVD)

Publié le 03 octobre 2024 par Delromainzika @cabreakingnews

Le cinéma mexicain a toujours été un miroir impitoyable de la société, et avec Heroico, le réalisateur David Zonana ne fait pas exception. A l'occasion de la sortie en DVD du film Heroico qui a fait scandale au Mexique pour le sujet qu'il traite (une École Militaire avec ses travers), plongeons ensemble dans cet univers violent grâce à cette belle édition DVD par Blaq Out.

Luis, un jeune homme de 18 ans aux racines indigènes, entre au Collège militaire dans l'espoir de s'assurer un meilleur avenir. Là, il se heurte à un système rigide et violent, conçu pour faire de lui un parfait soldat.

Ce deuxième long-métrage, qui plonge dans l'univers rigide et brutal des académies militaires, a suscité une vive polémique au Mexique, et pour cause. Avec son ton pamphlétaire, le film dénonce ouvertement les abus, les humiliations et les violences institutionnelles subies par les jeunes recrues. En s'inspirant de faits réels, Heroico nous entraîne dans une réflexion troublante sur la culture de la violence dans un pays en proie à de profonds maux sociaux. L'intrigue de Heroico suit le parcours de Luis, un jeune homme issu d'un milieu modeste et aux origines indigènes. Déterminé à subvenir aux besoins de sa mère malade, il décide de rejoindre l'armée mexicaine, espérant y trouver un avenir meilleur. Dès les premières minutes, le spectateur est frappé par l'atmosphère oppressante qui règne au sein de l'académie militaire. La froideur des cadres, la brutalité des instructeurs et l'austérité des méthodes de formation contrastent violemment avec l'idéalisme de Luis. Très rapidement, les scènes d'humiliation se multiplient, transformant l'expérience du jeune homme en un véritable cauchemar.

Un des aspects les plus frappants du film est la manière dont il décrit l'apprentissage militaire non pas comme un simple abus de pouvoir individuel, mais comme une pratique systémique. Ce que d'autres films pourraient traiter à travers des personnages tyranniques isolés, Heroico le présente comme un phénomène institutionnalisé. L'idée que la violence et la soumission sont au cœur de la formation des futurs officiers militaires soulève des interrogations profondes. Ces méthodes, basées sur le bizutage et les brimades, semblent non seulement inefficaces mais aussi destructrices pour ceux qui les subissent. Sur le plan technique, Heroico se distingue par sa mise en scène sobre et son montage abrupt. Zonana opte pour une approche visuelle minimaliste, presque clinique, qui accentue l'inhumanité des traitements infligés aux jeunes recrues. L'usage de la caméra fixe, souvent placée à une distance froide et distante, renforce le sentiment d'isolement et de désespoir qui imprègne le film. Ce style délibérément austère sert à appuyer un propos qui ne cherche pas à adoucir la réalité de la violence militaire.

Cependant, cette mise en scène efficace est parfois alourdie par une surenchère de scènes violentes. La répétition des humiliations finit par étouffer le message du film, en accablant le spectateur d'un flot ininterrompu de brutalité. Bien que Heroico parvienne sans difficulté à susciter l'écœurement, il pèche par excès de démonstration. La nuance manque cruellement, et ce choix d'insister sur la violence sans relâche pourrait détourner l'attention du public du véritable propos du film : la critique d'une institution gangrénée par des pratiques archaïques et destructrices. L'un des aspects les plus intrigants de Heroico est sa manière de brouiller les frontières entre réalité et imaginaire. À mesure que Luis plonge plus profondément dans cet enfer militaire, le film introduit des scènes oniriques et cauchemardesques. Les visions du jeune homme, souvent ancrées dans des représentations mystiques aztèques, incarnent ses peurs et ses doutes face à la violence qui l'entoure.

Cette juxtaposition entre le réel et l'imaginaire apporte une profondeur supplémentaire à la psychologie du personnage, bien que le film ne cherche pas vraiment à explorer davantage le développement d'autres protagonistes, comme le sergent. Ce dernier reste une figure monolithique de cruauté, sans qu'on n'ait réellement accès aux raisons qui motivent son comportement. Cette immersion dans les cauchemars de Luis contribue à créer une ambiance oppressante, où le spectateur perd peu à peu ses repères. À un certain moment, on ne sait plus vraiment si ce que l'on voit est réel ou simplement le fruit des angoisses de Luis. Cet effet rappelle fortement l'influence de Stanley Kubrick, notamment son travail sur Full Metal Jacket et Shining, deux films où la violence psychologique est au centre de l'intrigue. Au-delà de la violence et des humiliations, Heroico soulève des questions plus larges sur la société mexicaine. À travers cette académie militaire, le film expose une institution qui, au lieu de former des protecteurs de la nation, produit des individus brisés, soumis à une hiérarchie cruelle et impitoyable.

Cette critique résonne fortement dans un pays où la violence, qu'elle soit sociale ou criminelle, est un problème omniprésent. L'armée mexicaine, souvent perçue comme un rempart contre les cartels et la criminalité, est ici montrée sous un jour bien différent, comme un acteur complice de cette violence systémique. Malgré ses excès, Heroico reste un film marquant. Son esthétique austère, ses paysages saisissants et la performance puissante de son acteur principal en font une œuvre incontournable du cinéma mexicain contemporain. Cependant, il est important de noter que ce film ne s'adresse pas à tout le monde. Son approche dure et sans concession peut déstabiliser, voire choquer, un public non averti. Pourtant, pour ceux qui sont prêts à affronter cette plongée dans la violence institutionnelle, Heroico offre une réflexion poignante sur la manière dont la brutalité peut devenir un outil de domination sociale.

En conclusion, Heroico est un film à la fois fascinant et éprouvant. Sa dénonciation des abus militaires, sa mise en scène sobre mais efficace, ainsi que son exploration des angoisses de son personnage principal, en font un long-métrage digne d'intérêt. Cependant, son approche parfois trop démonstrative et l'absence de nuances dans certains aspects de l'intrigue peuvent limiter son impact. Quoi qu'il en soit, Heroico reste une œuvre importante qui mérite d'être vue, ne serait-ce que pour son audace et sa volonté de questionner les pratiques militaires mexicaines.

La sortie en DVD du film Heroico, édité par Blaq Out, est une initiative appréciable, surtout pour un film avec un potentiel commercial limité. Cependant, bien que la qualité visuelle et sonore du disque soit bonne, l'absence totale de contenu additionnel se fait vraiment ressentir. Aucun bonus, ce qui est un peu décevant, surtout pour ceux qui aiment les coulisses et interviews qui permettent de mieux comprendre le film. Avec un sujet aussi fort, il aurait été intéressant d'explorer davantage cet univers. Malgré ce manque de suppléments, la qualité technique du DVD est très bonne. L'image standard est nette et met en valeur les magnifiques paysages du film. Les couleurs sont éclatantes, les contrastes bien marqués, et les scènes en extérieur, avec les décors mexicains, sont superbes. Les noirs sont profonds et l'image est sans défauts techniques, ce qui rend l'expérience visuelle très agréable.

Pour l'audio, deux options en version originale sous-titrée sont disponibles : une en stéréo et une en 5.1. La piste 5.1 se démarque, offrant une immersion plus complète dans l'atmosphère pesante du film. La bande-son, lourde et oppressante, se diffuse parfaitement dans toutes les enceintes, renforçant le malaise durant les scènes de violence et d'humiliation. Les dialogues restent clairs, même lorsque la musique devient plus intense. Malheureusement, il n'y a pas de piste pour les malentendants ou d'audiodescription, ce qui est regrettable pour un film de cette portée. En conclusion, le DVD de Heroico est un bon choix pour ceux qui aiment le cinéma mexicain et les films abordant des sujets sociaux. Bien que l'absence de bonus puisse décevoir, la qualité de l'image et du son fait de cette édition une réussite sur le plan technique, malgré son contenu minimal.