Il faut prendre de la hauteur -disais-tu-mais aussi la laisser paraîtrepresque fortuitementpour amener le vertige à soi.Il faut plonger dans l'anonymat du silenceet remettre à hier tout ce qu'on ne fera plus demain.
Il faut semblant
"On circule tout près de la mer, sur le bord de sa propre vie, revenant là toujours, sans trop savoir pourquoi, à cause du bleu sans doute, de la lumière qui change, des coques colorées des barques, du bruit léger du flot, du tintement des drisses contre les mâts, de tout ce temps perdu où l’on s’avance, ces lisières que l’on suit, ces invisibles fils, dans l’air, les doigts du vent dans les cheveux, ses paumes sur le visage."Jean-Michel Maulpoix
"Plus je vieillis et plus je croîs en ignorance,
plus j'ai vécu, moins je possède et moins je règne.
Tout ce que j'ai, c'est un espace tour à tour
enneigé ou brillant, mais jamais habité.
Où est le donateur, le guide, le gardien ?
Je me tiens dans ma chambre et d'abord je me tais
(le silence entre en serviteur mettre un peu d'ordre),
et j'attends qu'un à un les mensonges s'écartent :
que reste-t-il ? que reste-t-il à ce mourant
qui l'empêche si bien de mourir ?
Quelle force le fait encor parler entre ses quatre murs ?
Pourrais-je le savoir, moi l'ignare et l'inquiet ?
Mais je l'entends vraiment qui parle, et sa parole
pénètre avec le jour, encore que bien vague :
« Comme le feu, l'amour n'établit sa clarté
que sur la faute et la beauté des bois en cendres... » Philippe Jacottet