Je revenais de ma fatigante journée d'homme moderne et stressé quand soudain, j'entendis des chants harmonieux émaner d'un petit bar au détour d'une rue. C'était un bar ancien, tout fait de bois. Je suis entré et là, une guitare aux forts accents folk m'a accueilli de la plus belle des manières. Une voix masculine, douce et magnifiquement inspirée vint se greffer par dessus, puis une deuxième guitare, plus technique cette fois mais toujours avec ce côté pastoral qui me transporta immédiatement. Je fermais les yeux, j'étais en pleine nature, à l'orée d'un chemin menant à une montagne oubliée, celle des harmonies vocales. Car ces cinq musiciens, jeunes et barbus pour la plupart, connaissaient le précieux secret des harmonies à plus de trois voix, chères aux Beach Boys et aux Beatles bien des années avant leur naissance. Force était de constater que cette découverte m'avait donné une sacrée bouffée d'air frais dans ce monde musical où "No Stress" est utilisé comme titre de musique techno ultra répétitive et ... ultra stressante justement.
Car No Stress aurait pu être le titre de ce premier album éponyme des Fleet Foxes tant leur musique respire tour à tour la beauté, la plénitude et la paix. Après avoir réveillé le soleil sur "Sun It Rises", le groupe nous invite à sortir de la meute quotidienne sur "White Winter Hymnal", single accrocheur et généreux où leur talent de composition resplendit à chaque note. On retrouvera cette instantanéité sur d'autres titres plus loin dans l'album tels "Your Protector" ou "Oliver James", la clôture. Efficaces et universels, ils sonnent comme de futurs classiques de la musique contemporaine, ni plus ni moins, le genre qui reste en tête après une seule écoute et se cache dans un coin de notre inconscient pour resurgir de temps à autres tel une madeleine de Proust.
A leurs côtés, on retrouve d'autres compositions moins immédiates mais encore plus travaillées, avec toujours ces harmonies vocales qui font briller un soleil au zénith sur les guitares cristallines et la batterie martiale, toute en subtilité. Ragged Woods, Blue Ridge Mountains et Tiger Mountain Peasant Song (ma préférence personnelle) en sont des exemples fabuleux.
Tout n'est pas parfait, (après tout il ne s'agit que de leur premier album) et un aspect répétitif peut se faire ressentir au bout de quelques écoutes car les titres restent un peu tous dans la même veine. Mais quelle veine!
Les paroles quant à elles ne sont pas aussi lumineuses et gaies que pourrait le laisser penser la musique et invitent surtout à fuir ce monde pour retrouver nos vraies valeurs qui se situent bien sûr dans la nature. Sauf qu'ici, on ne parle pas d'environnement pour faire "in" et surfer sur une putain de vague commerciale où consommer vert fait de vous un homme meilleur pendant que les instigateurs du mouvement roulent en 4X4 un gros cigare à la bouche. Non, ici tout est authentique et le monde que Fleet Foxes nous incite à retrouver est celui où les feuilles sont encore vertes, où le pétrole vient à peine d'être découvert et où les gens vivent avec de vraies valeurs familiales non intéressées. Comme un père qui donnerait à son fils les clés d'une vie meilleure.
Utopique? Complètement. Mais que ça fait du bien d'y croire l'espace de ces 40 minutes en compagnie d'un des groupes les plus prometteurs de cette année 2008.
Aucune substance illicite n'a été consommée avant ou pendant la rédaction de cette chronique...