Le " buzz " organisé autour du film qui sort mercredi a atteint une rare intensité. De nombreuses griffes se sont installées dans le décor.
Impossible de l'ignorer, ou presque. " Sex and the City " sort au cinéma mercredi. L'arrivée sur grand écran des quatre héroïnes de la série télévisée typiquement new-yorkaise a été savamment orchestrée. Depuis quelques semaines, l'actrice principale, Sarah Jessica Parker, a fait la une d'une ribambelle de magazines féminins à travers le monde. Sans surprise, les marques se sont disputé le droit de s'associer au lancement du long métrage. Car, s'il y a une histoire où elles ont la part belle, c'est bien dans les aventures quotidiennes de ces jeunes femmes chaussées de Manolo Blahnik, abreuvées de " Cosmopolitan " et perfusées aux produits griffés. [...]
Stratégies mondialesLa palette des sociétés qui ont obtenu le droit de s'associer au film va de Mercedes à Coca-Cola avec sa boisson Glacéau, en passant par la jeune société Bag Borrow or Steal qui loue sac à main et bijoux sur la Toile. La vodka Skyy (groupe Campari) a lancé des cocktails aux noms de chaque héroïne.
Mais c'est Mercedes qui a mis en place l'une des stratégies mondiales les plus complètes autour du film. Le constructeur a emboîté les opérations les unes aux autres. Outre la présence de plusieurs de ses modèles dans le long métrage, l'industriel consacre au sujet un site spécifique, où il propose de retrouver les coulisses du tournage. Une vaste campagne publicitaire mondiale accompagne le dispositif, tandis que les concessions américaines diffusent des clips du film et que l'actrice Kim Cattrall était au côté du patron de Daimler AG au dernier Salon de Détroit pour présenter la nouvelle Mercedes Classe GLK qu'elle conduit à l'écran. L'un des objectifs : préparer le terrain pour le lancement de ce modèle qui devrait arriver en France en octobre prochain et aux Etats-Unis en janvier 2009. Alors que la sortie en DVD du film jouera dans la foulée les piqûres de rappel !
Le constructeur en profite, opportunément, pour rappeler qu'il est sponsor de la Fashion Week de New York, qui joue d'ailleurs un rôle dans l'histoire. Car pour capitaliser sur une initiative liée au cinéma, il faut lui donner de la cohérence.
L'association de Sephora à " Sex and the City " pour la France et quelques pays européens s'inscrit dans cette mouvance. Les parfums et cosmétiques vendus par l'enseigne trouvent une place logique dans un univers très féminin. " L'affinité est évidente. Modernes, urbaines, très actives, les héroïnes du film sont la quintessence de notre cliente type ", relève Renato Semerari, PDG de Sephora Europe. Les magasins proposent des stations de maquillage associant un produit à chaque personnage en fonction de son profil. L'enseigne a aussi créé l'événement avec la venue de Sarah Jessica Parker la semaine dernière dans sa boutique des Champs-Elysées à Paris. Elle y a dédicacé son nouveau parfum, Covet. Car la comédienne appose sa griffe sur des fragrances, mais aussi des vêtements. Sephora, qui orchestre au même moment une campagne publicitaire au cinéma, organise en outre un jeu en ligne, dont le gros lot est un voyage à New York, ville considérée comme la cinquième héroïne de l'histoire. Avec un succès sur le Web dépassant ses attentes.
Risque de cacophonie ?Faire participer le public constitue en effet l'une des clefs de l'association marque et film. La chaîne Teva a fait voter sur son site Internet les téléspectateurs sur leurs épisodes préférés de la série pour les diffuser. Le site unerencontre.com a, de son côté, lancé un concours avec pour gains des places de cinéma et des affiches.
A l'heure où les entrées doivent s'engranger très vite dans les salles, ces multiples soutiens - devenus indispensables aux blockbusters - aident le film de New Line à frapper fort en communication avant sa sortie. Il reste à voir si toutes les marques associées d'une manière ou d'une autre tireront bien leur épingle du jeu, tant elles sont nombreuses à être citées ou montrées au fil de l'histoire. On en annonce plus de 150 ! Au risque de générer de la cacophonie. " Dès que l'on dépasse huit à dix marques apparaissant dans un film, il se produit un effet de parasitage. Certaines ne sont jamais vues. Une griffe impliquée doit donc impérativement l'intégrer dans son propre scénario et trouver les bons relais à activer hors de l'écran ", rappelle Jean-Marc Lehu. Il ne juge cependant pas le " buzz " généré par le film excessif et de nature à susciter l'overdose chez le spectateur potentiel.
Dans cet édifice bien pensé, il aura quand même manqué une pierre : la montée des marches à Cannes, un temps évoquée pour une présentation de " Sex and the City " hors compétition. Les marques de luxe et de joaillerie associées au film ont perdu une occasion de rêve pour s'exposer sur tapis rouge.
Auteur : CLOTILDE BRIARD
Lu sur Les Echos