La série How to Die Alone, disponible sur Hulu, propose une approche à la fois douce et mordante de sujets souvent négligés par la comédie télévisée : l'anxiété, le doute de soi et les attentes impossibles que la société impose, surtout aux femmes. Melissa, ou Mel, jouée par Natasha Rothwell, est le cœur battant de cette série. Ce personnage si particulier, qui pourrait sembler rare à la télévision, est en fait un miroir pour bien des spectateurs. En abordant les premières étapes de sa réinvention personnelle, la série nous pousse à questionner nos propres barrières et nos peurs non résolues. Mel est une femme qui vit avec un bagage lourd d'angoisses, mais ce n'est pas juste une peur ordinaire. C'est une phobie paralysante de l'inconnu, un refus presque instinctif d'avancer dans la vie. Ce refus de se projeter plus loin l'emprisonne dans un emploi subalterne : elle conduit des voiturettes à l'aéroport JFK, alors qu'elle a une peur viscérale de voler.
Après avoir frôlé la mort, Mel, une employée de l'aéroport JFK noire, grosse, névrosée et fauchée, décide de réinventer sa vie, de commencer à vivre par tous les moyens.
Ce choix de carrière est un parfait reflet de la façon dont Mel aborde son existence : elle choisit la sécurité de ce qu'elle connaît, même si cela ne lui apporte ni bonheur ni satisfaction. La série excelle dans sa représentation de cette paralysie émotionnelle, à la fois touchante et réaliste, dans un environnement qui semble pourtant propice à l'évasion. Derrière chaque sourire ou blague que Mel peut lancer, on devine une lutte intérieure qui la consume. Elle se pense incapable de viser plus haut, de peur d'échouer ou d'être déçue encore une fois. Cette approche de la vie est dépeinte avec une sincérité brute, qui fait écho à de nombreuses personnes confrontées à des troubles d'anxiété ou un manque de confiance en soi. Ce qui frappe dans la série, c'est à quel point elle parvient à nous faire ressentir ce que vit Mel, avec une simplicité désarmante. Les premiers épisodes de How to Die Alone peuvent sembler quelque peu maladroits, notamment dans la manière dont la série tente d'exploiter l'environnement de l'aéroport.
Cet espace, riche en possibilités narratives et comiques, n'est pas toujours utilisé à son plein potentiel au début. On peut même avoir l'impression que la série hésite entre une comédie de bureau légère et un drame psychologique plus profond. Ce flottement initial donne à la série un ton qui semble parfois bancal, surtout pour les spectateurs qui espéraient une comédie pure. Mais à mesure que l'histoire progresse, la série gagne en assurance, et la dynamique change. Dès le quatrième épisode, on assiste à une transformation notable : Mel commence à sortir de sa zone de confort, à se remettre en question et à prendre des risques. Cette évolution de l'intrigue se ressent aussi dans le ton de la série, qui devient plus introspective, tout en conservant une dose d'humour rafraîchissante. L'épisode central, où Mel célèbre son 35e anniversaire de manière plutôt triste, est un tournant majeur dans son développement. Son plan, qui consiste à s'évader avec quelques douceurs et une série télévisée, dérape totalement et se termine par un passage à l'hôpital.
Cet événement la pousse à une prise de conscience douloureuse : si elle continue à vivre de la sorte, elle finira probablement seule, dans une vie sans éclat. Cette épiphanie marque le début de sa transformation personnelle, un chemin difficile mais nécessaire vers la rédemption. À travers cette quête, How to Die Alone montre combien il est important de se réapproprier sa vie, même quand on se sent brisé. Mel est loin d'être parfaite, et c'est précisément cette imperfection qui la rend si attachante. Elle ne devient pas soudainement une personne différente après cette prise de conscience, mais elle commence à franchir des barrières qu'elle avait érigées elle-même. Ce cheminement vers un nouvel équilibre est touchant, car il ne se fait pas sans douleur, ni erreurs. L'évolution de Mel est progressive, et c'est cette authenticité qui rend la série si pertinente. Outre l'évolution de Mel, la série brille aussi par les relations qu'elle tisse avec les personnages secondaires.
Rory, son meilleur ami, est un point d'ancrage important dans sa vie. Leur amitié est à la fois tendre et comique, mais elle révèle aussi les limitations que Mel s'impose dans ses interactions avec les autres. Les moments qu'elle partage avec sa famille, notamment son frère et sa mère, sont parmi les plus intenses et les plus révélateurs de la série. Ils nous donnent un aperçu des origines de ses doutes et de son anxiété, et de la manière dont les dynamiques familiales influencent notre trajectoire personnelle. Ces scènes permettent à la série de creuser dans des thématiques plus profondes, tout en conservant cet équilibre fragile entre le drame et la comédie. Mel, malgré ses luttes, est un personnage qui nous fait rire tout autant qu'il nous fait réfléchir. Sa personnalité est empreinte de cette dualité que beaucoup ressentent : l'envie d'aller de l'avant et la peur paralysante de l'échec. Un des éléments les plus rafraîchissants de How to Die Alone est la manière dont elle aborde la question de la représentation. Mel est une femme noire, ronde et sans grandes ressources financières, un profil souvent relégué aux seconds rôles à la télévision.
Pourtant, ici, elle est au centre de tout. La série aborde son vécu sans tomber dans le piège des stéréotypes. Au contraire, elle lui donne une profondeur qui la rend unique à l'écran. Son parcours n'est pas simplement celui d'une femme cherchant l'amour ou le succès, mais celui d'une personne cherchant à se libérer des chaînes invisibles qu'elle s'est elle-même imposées. How to Die Alone est bien plus qu'une simple comédie dramatique. C'est une série sur la résilience, sur la capacité de surmonter ses peurs les plus intimes pour finalement vivre une vie qui nous ressemble. Mel n'est pas un modèle de perfection, mais elle incarne une vérité humaine : celle que le courage n'est pas l'absence de peur, mais la volonté de la surmonter. La série nous invite à suivre ce voyage personnel, non pas comme un conte de fées où tout se termine bien, mais comme une exploration honnête des complexités de la vie adulte. Et au final, même si Mel se débat avec ses angoisses, on a l'impression qu'elle est en train de trouver son propre chemin vers la lumière.
Note : 6/10. En bref, une ode à la résilience.
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