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Convention : comment Hillary a joyeusement torpillé Obama

Publié le 27 août 2008 par Drzz

Convention : comment Hillary a joyeusement torpillé ObamaVous lirez la presse internationale et celle-ci sera unanime : Hillary Clinton a soutenu la candidature de Barack Obama à force d’arguments et de slogans accrocheurs. « Avez-vous voté pour moi ou pour une cause plus grande ? » a-t-elle demandé à ses 18 millions de supporters, hier soir (4h ce matin en France), dans le Pepsi Center de Denver. « Votez Obama ! » a-t-elle conclu sous les vivats.

Elle a dit cela, oui. Elle le devait pour ne pas faire figure de traîtresse dans son parti. Mais elle n’a pas seulement couvert Obama de louanges. Au printemps dernier, le blog drzz vous avait proposé un article intitulé « la brillante stratégie de Hillary Clinton » où je détaillais la nouvelle vision adoptée par la sénatrice de New York depuis qu'elle a été écartée de la course à la présidence cette année. Je me tiens à cette analyse. Je lui ai même trouvé une nouvelle pertinence hier soir. Décryptage.

Hillary Clinton, tout comme son mari, est une politicienne d’expérience. Rien à voir avec les clowns comme Dukakis, Gore, Kerry ou Obama. De fait, les Clinton ont été les seuls Démocrates à remporter la Maison-Blanche depuis trente ans bientôt. Quand les autres avancent leurs pions, les Clinton ont déjà deux coups d’avance.

Pour mener à bien son plan, à savoir gagner la Maison-Blanche en 2012, Hillary doit écarter Obama à tout prix. Il est hors de question que celui-ci gagne et contraigne la sénatrice de New York à attendre huit ans (réélection oblige). Sa seule mission, cette année : faire capoter la candidature d’Obama. Sur le podium de la convention démocrate, Hillary s’est livrée à une splendide opération de sabotage.

Vous lisez bien : Hillary n’a pas du tout soutenu Obama pendant son discours. Au contraire. Les oreilles attentives auront reconnu de violentes critiques et moqueries adressées au sénateur de l’Illinois. Ces coups de poignard sont imperceptibles par le téléspectateur lambda, mais ils sont bel et bien là.

Convention : comment Hillary a joyeusement torpillé Obama

  • « Je suis fière de mon pays » : cette volée de bois vert est directement adressée à Michelle Obama, la femme du sénateur de l’Illinois qui avait déclaré : « Je suis fière de mon pays pour la première fois de ma vie » au printemps dernier. La télévision montrait en direct Michelle Obama dans le carré VIP, livide.
  • « J’ai visité 50 Etats » : une référence à la bévue d’Obama, lequel avait déclaré par erreur que son pays comptait 57 Etats. 
  • « Lorsque j’ai visité des soldats blessés » : une référence à la polémique suscitée en Allemagne par Barack Obama lorsqu’il a refusé de visiter un hôpital militaire.
  • « John McCain est mon ami ». Pareil dénominatif flatteur n’a pas été adressé à Obama.
  • « 18 millions d'électeurs ont voté pour Barack Obama et 18 millions pour moi ». Sous-entendu : j'aurais autant de légitimité à être à sa place jeudi soir !  
  • « Les soldats d’Irak rentreront d’Irak avec honneur ». C’est, mot pour mot, un slogan de McCain !
  • Hillary a conclu son discours par quinze minutes pleines consacrées au combat des féministes – un comble alors que la convention démocrate s’ouvre sur un ticket 100% masculin !  

Dans un one-woman-show mené tambour battant, Hillary a enthousiasmé ses supporters et transformé la convention d’Obama en un meeting à sa gloire. Elle a parlé d’elle et de ses idées. A aucun moment, elle n’a expliqué qui était l’homme Obama ou quelles étaient ses capacités supposées de leader. Ces questions cruciales pour l’électorat ont été soigneusement évitées. Pour appuyer le message, Hillary s'est présentée vêtue d'une tenue orange, couleur symbole d'hostilité.
Sur FOX, Bill Kristol a souligné qu'à aucun moment l’ancienne First Lady n’a tenté de bâtir une image d’un Obama proche des gens. A l’opposé, son discours pouvait se résumer comme suit : « nous avions de grandes idées, je les incarnais mais j’ai perdu, alors votez Obama puisque vous n’avez plus le choix ».

La grande gagnante de ce soir est Hillary elle-même. Sur CNN, une correspondante a posé une question impensable quelques jours plus tôt : « et si les Démocrates avaient fait une grosse erreur en refusant de la nommer vice-présidente ? » La question risque bien de se répandre dans les rangs démocrates. « Les délégués regretteront leur vote pour Obama » a pour sa part prédit le journaliste du Washington Post Charles Krauthammer. Vous avez dit union du parti ? Hier soir, Hillary a semé les graines de la discorde.

Convention : comment Hillary a joyeusement torpillé Obama

La sénatrice Clinton a avancé ses pions. Ses supporters sont encore plus frustrés qu’avant. Hier soir, dans les rues de Denver, certains d’entre eux arrachaient les affiches d’Obama ! Maureen Dowd, du New York Timesparle d'"atmosphère submergé de haine" entre les partisans de Hillary et ceux d'Obama. Dans les hôtels, les délégués de l’ancienne First Lady sont pris de remords. Les Démocrates comptent les obliger à rester enfermés dans leurs hôtels pour éviter qu'ils se concertent et attribuent finalement la candidature à Hillary ! Le parti doute… Il s’interroge sur la marche à suivre à deux jours du discours d’intronisation de Barack Obama !

Ecartés de la première place, les Clinton sont revenus en force alors que leur concurrent décline dans les sondages. Ils se sont rappelés à la mémoire de tous et déclaré, devant l’Amérique muette, que nul autre candidat que le leur ne pouvait aspirer au poste suprême. L’avertissement n’est pas voilé : hier après-midi, durant un cocktail avec des délégués démocrates, Bill Clinton leur a raconté  l’histoire de "deux types", l’un aux mêmes valeurs qu'eux mais inexpérimenté et l’autre, moins attractif mais plus qualifié. « Lequel des deux choisiriez-vous ? » a-t-il demandé à son audience. Les supporters d’Obama ne s’en sont toujours pas remis. 

Avec ce discours, les Clinton ont porté un coup très sévère à leur ennemi. Qu’on se le dise désormais : le 26 août 2008, Hillary a lancé sa campagne pour devenir Présidente des Etats-Unis en 2012. Et personne ne l’arrêtera. 


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