L'abattage des chèvres sauvages dans les Corbières : une solution inévitable pour éviter le chaos routier et protéger les vignes
Des chèvres redevenues sauvages, un problème persistant
Dans les terres arides et accidentées des Corbières, au cœur du massif de Fontfroide, près de deux cents chèvres errent en totale liberté.
Depuis des années, ces bêtes, autrefois domestiquées, ont renoué avec un état presque sauvage, traversant routes et dévorant les vignobles qui parsèment leur chemin. Rien, ni personne, ne semble en mesure de freiner leur errance imprévisible.
Les élus locaux, fatigués de cette situation inextricable, ont tenté à maintes reprises de raisonner la propriétaire du troupeau. Les plaintes se sont accumulées, les tentatives de médiation se sont succédé, mais tout cela n'a abouti qu'à un sentiment d'impuissance généralisé.
Les chèvres continuent à divaguer, et avec elles, le risque d'accidents mortels s'intensifie à chaque nouvelle traversée de route.
Une décision radicale : l’abattage
Face à ce désordre rampant, la solution a fini par s'imposer, brutale mais inévitable.
Le préfet de l'Aude, dans un élan de pragmatisme désespéré, a signé un arrêté qui autorise l’abattage de toutes les chèvres s'aventurant sur les routes départementales des cinq communes concernées.
Ces créatures, à la fois belles et destructrices, ont franchi la ligne invisible qui sépare le supportable de l'intolérable.
Jusqu'au 30 septembre, période critique des vendanges, où le flot de véhicules s'intensifie, les opérations de chasse se dérouleront.
La logique économique et sécuritaire a pris le dessus : mieux vaut sacrifier ces animaux que de risquer la vie des automobilistes ou d'aggraver encore la situation des vignerons, déjà étranglés par la sécheresse et l’effondrement du marché du vin.
Des drones et des louvetiers pour traquer les chèvres
Rémi Récio, sous-préfet de Narbonne, porte la responsabilité de cette décision. « Je ne vois pas d’autres solutions », avoue-t-il sans détour, avec une froideur administrative que l’urgence justifie. « Nous avons tenté de réguler le troupeau l’année dernière, mais le problème revient, et je refuse de prendre le risque d’un accident. »
Les drones de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) survolent désormais le massif pour repérer les déplacements des chèvres.
Bientôt, les louvetiers entreront en scène, fusil en main, prêts à nettoyer les routes serpentées où ces bêtes innocentes, par simple instinct de survie, traversent pour aller boire à la rivière en contrebas.
Un choix imposé par la nécessité
Pour Bruno Texier, maire de Portel-des-Corbières, la décision, bien que compréhensible, laisse un goût amer. « Ce sont de belles bêtes », reconnaît-il, comme si cette beauté ajoutait encore à l’injustice de leur sort.
Mais la réalité est implacable : les chèvres détruisent les vignes, et les vignerons n'ont plus de marge d’erreur. « Ils n'ont vraiment pas besoin de ça en ce moment », ajoute Texier, soulignant un malheur supplémentaire dans une région déjà frappée par la sécheresse et la chute des prix du vin.
Ici, la nature n’est plus un refuge idyllique, mais un fardeau, une force indomptée qui s’oppose, de plus en plus souvent, aux intérêts humains.
Dans ce combat silencieux, les chèvres ne sont que les premières victimes.