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S’adapter

Publié le 06 septembre 2024 par Adtraviata
S’adapter

Quatrième de couverture :

C’est l’histoire d’un enfant différent, toujours allongé, aux yeux noirs qui flottent. C’est l’histoire de sa place dans la maison cévenole où il naît, au milieu de la nature puissante ; de sa place dans la fratrie et dans les enfances bouleversées. Celle de l’aîné, qui, dans sa relation fusionnelle avec l’enfant, s’abandonne et se perd. Celle de la cadette, dans la colère et le dégoût de celui qui a détruit l’équilibre. Celle du petit dernier qui a la charge de réparer, tout en vivant escorté d’un frère fantôme. Comme dans les contes, les pierres de la cour témoignent.
La naissance d’un enfant handicapé racontée par sa fratrie.

Coup de coeur pour ce roman aussi délicat que la peau des joues de l’enfant, cet enfant handicapé dont la naissance vient heurter la vie d’une famille solide, bien implantée dans un village des Cévennes. Un peu comme dans un conte, ce sont les pierres de la cour qui racontent l’histoire de cette fratrie et le bouleversement lié à la présence de ce frère différent, à l’espérance de vie limitée. Les personnages ne seront jamais désignés autrement que par leur place dans la famille, l’aîné, la cadette et le dernier.

Chacun réagit, s’adapte différemment : l’aîné s’adoucit, se fragilise même complètement en prenant soin de son petit frère et en refoulant stoïquement ses émotions quand celui-ci sera placé en maison d’accueil. La cadette se raidit dans la colère, dans une indifférence feinte puis se laisse adoucir par sa grand-mère et entreprend de relier les membres de sa famille. Le dernier, né après la mort de l’enfant, porte le poids d’une absence et se sent investi d’une mission de réparation.

Le tout est écrit avec une grande finesse, avec style par Clara Dupont-Monod dont je découvre la plume avec ce roman. C’est un petit bijou d’humanité qu’elle nous offre là, dans cette cour de ferme ancrée dans la montagne cévénole, avec des personnages complexes dans l’évolution de leurs émotions, des personnages attachants qu’elle nous rend proches par la magie de son écriture.

Un roman à lire, absolument. (Et un beau titre, en cette rentrée.)

« Nous, les pierres rousses de la cour, qui faisons ce récit, nous nous sommes attachées aux enfants. C’est eux que nous souhaitons raconter. Enchâssées dans le mur, nous surplombons leurs vies. Depuis des millénaires, nous sommes les témoins. Les enfants sont toujours les oubliés d’une histoire. »

« Depuis, l’aîné a grandi sans se lier. Se lier, c’est trop dangereux, pense-t-il. Les gens qu’on aime peuvent disparaître si facilement. C’est un adulte qui a associé la possibilité du bonheur à celle de sa perte. Vents mauvais ou cadeaux, il ne laisse plus à la vie le bénéfice du doute. Il a perdu la paix. Il a rejoint ces êtres qui portent au cœur un instant arrêté, suspendu pour toujours. En lui quelque chose est devenu pierre, ce qui ne signifie pas insensible mais plutôt endurant, immobile, implacablement identique au gré des jours. » (p. 53)

« Dira-t-on un jour l’agilité que développent ceux que la vie malmène, leur talent à trouver chaque fois un nouvel équilibre, dira-t-on les funambules que sont les éprouvés ? » (p. 95)

Clara DUPONT-MONOD, S’adapter, Le Livre de poche, 2022 (Editions Stock, 2021)


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