Maniac(Maniac)
Auteur : Benjamin Labatut
Traduit de l’anglais (Chili) par David Fauquemberg
Éditions : Grasset (4 Septembre 2024)
ISBN : 9782246833437
450 pages
Quatrième de couverture
John von Neumann a posé les bases mathématiques de la
mécanique quantique, inventé la théorie des jeux, créé le premier ordinateur
moderne et joué un rôle clé dans le projet Manhattan, la construction de la
bombe atomique américaine. Mais lorsque, à la fin de la Seconde Guerre
mondiale, il conçoit le MANIAC, une calculatrice qui selon ses mots «saisirait la science à la gorge en libérant
une puissance de calcul illimitée», personne
ne se doute que le monde est sur le point de changer pour toujours. Car le
MANIAC, produit d’un esprit logique, cynique et visionnaire, ouvre les
perspectives infinies de l’intelligence artificielle – à même de menacer la
primauté de l’espèce humaine.
Benjamín Labatut place von Neumann au centre d’un roman qui débute avec Paul
Ehrenfest, physicien autrichien et ami d’Einstein devenu fou après avoir
compris que la science et la technologie allaient devenir des forces
tyranniques. MANIAC se conclut une centaine d’années plus tard, au cœur d’une
partie de Go entre le Maître sud-coréen Lee Sedol et AlphaGo, un programme
d’intelligence artificielle. Le monde assiste alors à la naissance d’une forme
d’intelligence encore hybride et capricieuse, qui se trompe, mais agit aussi
par inspiration pure. Et d’autres suivront, toujours plus puissantes, toujours
plus terrifiantes…
Triptyque inquiétant sur les rêves du XXe siècle et les cauchemars du XXIe,
MANIAC entraîne le lecteur dans les labyrinthes de la science moderne et lui
laisse entrevoir l’obscurité qui la nourrit. Un roman vertigineux sur les
limites de la pensée et les délires de la raison.
Mon avis
Maniac est un roman flamboyant.
Benjamin Labatut y présente ce qui s’apparente à une biographie romancée de John von Neumann, mais il parle également de Paul Ehrenfest, de l’histoire de l’intelligence artificielle, du jeu de Go, de la physique quantique.
C’est fascinant, captivant, enthousiasmant car il a une écriture tellement fluide (merci au traducteur) que tout cela, malgré certains propos scientifiques ardus, semble couler de source et être à notre portée.
Une des grandes forces de ce texte est sa construction avec des interventions de ceux qui ont côtoyé John (comme s’ils répondaient à des questions dans un entretien) et qui parlent de lui ; des passages en italiques pour nous apporter des informations réelles importantes, des photos, des questionnements, des éléments pour mieux connaître la physique quantique, l’informatique…
John von Neumann est un homme à part. Il a appris à lire facilement, a « ingurgité » des notions mathématiques sans aide, etc …Il a participé à des projets sur l’arme nucléaire, sur la création de l’ordinateur MANIAC (« il savait que le vrai défi n’était pas de construire ce truc mais de lui poser les bonnes questions dans un langage intelligible pour la machine. ») C’est quelqu’un d’exceptionnel ; complet, complexe, déterminé.
« Nous lui devons tellement.
Parce qu’il ne nous a pas seulement fait don de l’avancée techonologique la
plus importante du XX ème siècle.
il nous a légué une partie de son esprit. »
C’est comme s’il avait permis aux autres de raisonner autrement !
C’est fabuleux !
Dans la dernière partie, le jeu de Go est mis en exergue.Lee Sedol, grand maître de cette discipline, perd contre un ordinateur en plusieurs manches. La machine peut-elle prendre le pas sur l’homme ? On peut s’interroger sur le pourquoi de cette partie, du lien avec le reste. Le jeu de Go est à la fois simple et complexe, tout à fait comme le langage binaire qui permet pourtant de grandes choses, non ?
L’auteur a écrit une fiction en partant de faits réels, il nous présente le fonctionnement de l’esprit de certains chercheurs, il cerne leur personnalité et leurs difficultés quand les recherches auxquelles ils se consacrent trouvent des limites.
Pour moi, un recueil à part, riche et qui m’a emportée !
S’il fallait mettre un bémol à ce livre, c’est peut-être le fait que la multitude des intervenants oblige le lecteur à bien cerner qui s’exprime.