Il arrive parfois en lisant un bouquin qu’on se dise qu’il y a matière à faire un bon gros film. Babylon Babies de Maurice G. Dantec est de ceux-ci. L’ayant lu il y a une dizaine d’années, je me rappelle avoir particulièrement accroché à l’histoire. Alors quand Mathieu Kassovitz se lance dans l’adaptation ciné du bouquin et qu’il déclare partout que c’est le projet dont il a toujours rêvé, on s’attend à quelque chose d’au moins très bien. Perdu… Explication juste en-dessous.
Babylon A.D. – Grand glabi boulga SF
Le futur. Toopor, un mercenaire vivotant en Serbie, est contacté par la mafia russe afin de livrer une jeune femme étrange à New York, pour la remettre entre les mains d’une étrange secte. Mais en chemin Toopor va se rendre compte qu’Aurora, la jeune fille, a une valeur particulièrement inestimable…
Ce film est une grosse déception. Et le foirage est tellement hallucinant qu’on peut franchement se demander si Mathieu Kassovitz ne se fout pas ouvertement de notre gueule. Et pourtant il y avait matière à faire quelque chose de couillu, de sympathique par la thématique traitée (finalement très proche de celle des Fils de L’Homme avec Clive Owen), avec de jolies réflexions sur la religion. Mais non.
En lieu et place, Kassovitz nous sort un grand film malade. A commencer par l’image, particulièrement moche. On oscille sans cesse entre quelques plans superbes (l’arrivée d’un sous-marin sous la glace, une scène de panique dans une gare), et surtout beaucoup de très très moche (des incrustations pourries sur la banquise, un New York qui ressemble à des maisons playmobils avec des effets très mal incrustés…). De même les quelques scènes d’action sont tellement mal découpées qu’elles donnent mal à la tête (une scène qui devait être d’anthologie entre Le Banner et Vin Diesel et juste traitée n’importe comment).
On peut également citer des choix douteux : les yamakasis qui font une apparition ridicule, un casting international vraiment étrange (Vin Diesel, Michelle Yeoh et Mélanie Thierry dans le même plan c’est space non ?), des seconds rôles qui cabotinent (Rampling, Wilson, Depardieu…), des passages ultra gnan gnan ou on devient super potes alors qu’on se faisait la tête jusqu’ici, des scènes d’action en scooter des neiges qu’on dirait tout droit sorties de xXx….
Kassovitz a bataillé tout au long de son tournage pour mener à bien ce film. Il s’est brouillé avec Vincent Cassel d’abord pressenti pour le rôle de Toorop, puis avec Vin Diesel, puis avec les producteurs… et malheureusement le résultat se voit à l’écran. Le film est brouillon, dur à suivre, fait durer deux secondes des scènes importantes et accorde de longues plages pour certaines quasi inutiles… Mais par moment le film se permet quelques fulgurances où l’on aperçoit furtivement ce que Babylon A.D. aurait pu et du être.
Et c’est finalement ces quelques fulgurances qui font encore plus rager. Pourquoi et comment Kassovitz a pu louper à ce point le coche ? Il avait un sujet en or, il le méprise. Alors certes ses détracteurs rappelleront que Gothika, sa première incursion à Hollywood, ne cassait déjà pas des briques, mais on était franchement en droit d’attendre mieux d’un faiseur d’image de sa trempe.
Il a été question un certain temps d’une version longue de deux heures et demie. Il s’avère que c’était une blague de Kasso aux distributeurs pour les faire raler. C’est dommage on aurait pu espérer qu’un remontage et plus de matière auraient permis de comprendre ce ratage. Il n’en sera malheureusement rien. Amoureux de SF ou du travail du frenchy, je vous conseille de passer votre chemin et de retourner plutôt voir The Dark Knight…