Satire sociale et politique, le roman s'attache aux pas de Jakob Fabian, un publicitaire trentenaire vivant à Berlin. Fabian est un observateur cynique et désabusé de la décadence et de la corruption qui gangrènent la société allemande de l'époque. Il perd son emploi et tente de naviguer dans un monde de plus en plus chaotique et moralement ambigu. A la fois brulot antimilitariste et description sans fard des mœurs sexuelles, le roman témoigne de l'esprit d'une époque tourmentée, critique de la société de Weimar, marquée par l'instabilité économique et sociale, signes avant coureur du naufrage national " L'Europe était dans la cour de récréation ; Les professeurs étaient partis. Il n'y avait plus d'emploi du temps. Le Vieux Continent ne parviendrait pas à boucler le programme. " p 42
Le taux de chômage élevé entraine une dépression morale succédant à la crise économique, avec ce besoin frénétique pour tout un chacun de s'étourdir,quand les partis eux-mêmes sont dénués de scrupules. Tous les signes avant coureur du désastre imminent sont là, le pouvoir n'étant jamais utilisé à bon escient " Celui-ci en use à son profit, celui là au bénéfice de sa famille, l'un pour payer moins d'impôts, l'autre privilégie les gens qui ont les cheveux blonds, le cinquième ceux qui font plus de deux mètres, le sixième teste une formule mathématique sur l'humanité. " p 53
Fabian moraliste, il observe ses contemporains et tente d'évaluer leur capacité à s'amender, mais n'observe pas seulement, participe, expérimente cette perte des valeurs morales et le cynisme de cette société berlinoise à l'agonie.
Censuré à sa parution en Allemagne en 1931, brûlé par les nazis en 1933, ce roman de l'écrivain Erich Kästner paraît en français dans son intégralité seulement en 2016.
Un roman brillant indispensable !